Coach de Louis Mouton et Henri Saivet, ancien entraîneur de Florian Tardieu, Anthony Briançon et Lamine Fomba, camarade de promotion de Laurent Batlles au BEPF, Nicolas Usaï nous a livré ses impressions avant de venir défier les Verts dans le Chaudron ce samedi après-midi en ouverture de la 15e journée de L2.
Nicolas, dans quel état d’esprit abordes-tu ce déplacement à Sainté ?
On aborde ce déplacement comme tous les matches, avec l’envie de performer, d’avancer dans notre quête de points. C’est toujours très agréable d’aller à Geoffroy-Guichard. Mais ça reste un match parmi beaucoup qui vont se dessiner dans les semaines à venir car on a la particularité de jouer trois jours plus tard un match en retard contre Concarneau à Guingamp. Ça nous fait jouer 5 matches en 15 jours. On commence par un gros morceau, Sainté dans le Chaudron.
Il y aura plus d’ambiance que lors de ta dernière venue à GG.
C’est sûr ! Ce n’est pas pour me déplaire car Geoffroy-Guichard sans son magnifique public, ce n’est pas vraiment le Chaudron. Les stades sont faits pour être vivants, surtout celui-là. Geoffroy-Guichard, c’est assurément l’une des plus grosses ambiances en France. Quand je suis venu à Sainté avec Nîmes en début de saison dernière, le match était à huis clos. On avait eu un sentiment amer de jouer dans des conditions pareilles. Samedi après-midi ce sera différent, heureusement !
Quand bien même tu es Marseillais et que tu as été formé à l’OM, t’es d’accord avec moi pour dire que le Chaudron est le stade le plus chaud de France ?
Pas forcément. Le Vélodrome, c’est à part. Même si je n’étais pas marseillais, je dirais ça. Le Vélodrome… c’est le Vélodrome quoi ! C’est énorme. C’est exceptionnel. Mais bien sûr Geoffroy-Guichard fait aussi partie des plus grosses ambiances de France avec Bollaert et la Meinau.
Tout en comptant un match en retard, le Pau FC est dans la première partie de tableau. Quel bilan fais-tu de ce premier gros tiers de saison ?
C’est très compliqué de tirer un bilan alors qu’on s’apprête à enchaîner les matches. Le bilan, on le fera le 19 décembre, après la réception de Troyes qui bouclera la phase aller du championnat. L’important, c’est de faire tourner le compteur points. On en a pris 19 en 13 matches, on espère dépasser la barre des 20 points le plus rapidement possible. C’est beaucoup trop tôt pour analyser quoi que ce soit. On se rend compte qu’on est capable de faire de bonnes choses mais on a aussi eu des trous d’air. L’idée, c’est d’être régulier dans la performance, avec un calendrier où on aura besoin de tout le groupe.
On te souhaite un trou d’air chez les Verts et beaucoup de succès après. Tu as un point commun avec Laurent Batlles : tu es passé d’une défense à trois à une défense à quatre en cours de saison. Tu peux nous en dire plus sur ce changement tactique ?
Oui, Laurent a inauguré ce changement quand les Verts ont gagné à Caen et pour ma part j’ai opéré ce changement à l’occasion du match à Bastia qu’on a gagné 4-1. A la base, je n’avais pas forcément prévu de jouer avec une défense à 3 en début de saison mais on avait une pléthore de défenseurs centraux et pas forcément de latéraux. Depuis quelques temps, on joue à 4 derrière mais on est en capacité de changer d’organisation. On a rejoué à 3 ce week-end en Coupe de France. Aujourd’hui, c’est plus une question de principe que d’organisation. Comme Laurent je pense, je suis plus pragmatique que dogmatique.
Ton équipe a la 2ème meilleure attaque du championnat derrière celle d’Auxerre, qui a fait des misères aux Verts lors de la dernière journée. Mais ta formation a aussi la plus mauvaise défense de L2, elle a pris 2 fois de plus de buts que Sainté (24 contre 12). T’analyses ça comment ?
On est en capacité de faire du jeu, on sait faire mal aux équipes adverses offensivement mais de temps en temps, on perd l’équilibre, tout simplement ! L’idée c’est de le retrouver mais je veux qu’on soit toujours en capacité d’attaquer et de créer des problèmes à l’adversaire. J’ai envie que mon équipe continue de produire du jeu offensif tout en se montrant bien entendu beaucoup plus hermétique.
Que peux-tu nous dire sur Louis Mouton, qui ne pourra pas jouer ce samedi à Geoffroy ?
Je trouve ça toujours dommageable de priver un joueur de jouer un match, même si on respecte totalement l’arrangement entre les deux clubs, bien entendu. Mais c’est une grosse frustration pour lui de ne pas pouvoir jouer dans son Chaudron. Louis est un garçon qui réalise un bon début de saison. Il a fait des bons matches. C’est encore un jeune joueur. Il a une excellente mentalité. Il est très à l’écoute. Je suis très satisfait de Louis à l’instant T.
C’est un garçon qui a une bonne technique de passe. Louis lit bien le jeu et est intelligent dans ses déplacements. Il doit bien entendu être régulier dans les performances et être en capacité de récupérer des ballons. Les matches où il a été bon, c’est les matches où il a été vraiment très bon dans la récupération. Quand il récupère le ballon, il est capable de bien le maîtriser, de bien l’utiliser. Il faut qu’il trouve cet équilibre-là.
Je souhaiterais que Louis frappe encore plus au but. C’est lui qui a marqué en Coupe de France samedi sur le terrain de Chauray, il a mis une très belle frappe qui nous a qualifiés. C’est sur ce genre d’actions que j’aimerais le voir plus souvent. En tout cas je me réjouis de l’avoir dans mon effectif. C’est un garçon qui est très bien dans le groupe, très apprécié de ses coéquipiers. Je le sens épanoui et déterminé à encore progresser. J’apprécie son état d’esprit, la vie qu’il amène dans le groupe.
On le sentiment de temps en temps que Louis est plus âgé que son âge. Il n’a pourtant que 21 ans mais c’est un garçon très mature. Il a encore des axes d’amélioration bien sûr. J’aimerais le voir encore plus décisif dans le jeu offensif. Il a une bonne frappe de balle, il pourrait davantage mettre à profit cette qualité. Louis doit aussi récupérer un maximum de ballons pour être vraiment considéré comme un milieu complet.
Je suis très optimiste sur sa capacité à s’améliorer car il a une vraie qualité d’écoute et d’investissement. C’est un garçon qui progresse et qui va continuer de progresser. Il a un temps de jeu conséquent chez nous cette saison, c’est l’intérêt du prêt. Quand il retournera à Saint-Etienne la saison prochaine, c’est un joueur qui aura passé un pallier.
Tu as également la chance de pouvoir compter sur un joueur passé par l’ASSE la saison 2016-2017.
Exact ! Henri Saivet. C’est le capitaine. A la base le capitaine c’est Antoine Batisse mais cette saison Henri porte très souvent le brassard. C’est un véritable leader technique. C’est un joueur qui peut être décisif. Depuis le début de saison, il a mis 4 buts et délivré 3 passes décisives en seulement 8 matches car il a été absent un mois cet été en raison d’une blessure au mollet survenue lors de la première journée. Henri, c’est le joueur qui détient le trousseau de clés de notre animation offensive.
Henri, c’est un garçon qui est très intéressé par le jeu. Il s’intéresse à la tactique, aux organisations. On sent vraiment qu’il a une réflexion sur le jeu en lui-même donc c’est toujours très agréable d’échanger avec lui. C’est un garçon expérimenté qui a un rôle très important dans le groupe. Dans l’effectif, il y a des garçons avec beaucoup d’expérience comme Henri Saivet, Xavier Kouassi, Khalid Boutaïb ou encore Ousmane Kanté.
Tous les joueurs que je viens de te citer ont allègrement franchi la trentaine et ont un vécu significatif dans le football professionnel. Mais on a aussi dans le groupe pas mal de jeunes de 2004 ou 2005 : Thérence Koudou, Oumar Ngom, Lenny Pirringuel, Yonis Njoh. On peut ajouter Ange Ahoussou qui est de fin 2003. Les anciens jouent automatiquement un rôle de transmission, ça se fait naturellement chez eux et ça se passe très bien, les jeunes sont réceptifs et conscients d’être bien encadrés, bien guidés.
Au Pau FC, tu bosses avec Louis mai aussi avec Luis, passé lui aussi par la maison verte mais beaucoup moins longtemps que le grand frère de Jules…
Effectivement, Luis de Sousa avait renforcé la cellule de recrutement de l’ASSE avant de venir au Pau FC en tant que directeur sportif. On n’avait jamais travaillé ensemble auparavant, mais on se connaissait car on s’était croisé quelques fois. On a été très rapidement sur la même longueur d’ondes en ce qui concerne les profils que l’on recherchait dans le recrutement. Notre entente est très bonne. Il rentre du Sénégal, il y a passé une quinzaine de jours. Il était avec le président. Les bonnes relations entre un directeur sportif et un entraîneur, c’est quelque chose de très important dans un club et à ce jour ça se passe très bien, je suis content de collaborer avec Luis.
C’est lui, Luis, qui a fait venir Louis ?
Oui, ça s’est fait très rapidement. Iyad Mohamed s’est fait les croisés la J2 à Caen, il fallait absolument recruter au milieu, sachant qu’on était déjà en recherche dans ce secteur de jeu. Luis connaissait Louis, il avait des relations avec l’ASSE. Louis est arrivé un mercredi, il a fait deux entraînements avec nous avant de faire ses débuts. Il est entré en jeu dès la 25e minute pour remplacer Jean Ruiz, sorti sur blessure. Louis a fait un très bon premier match. Il s’est très vite adapté. C’est souvent très bien de ne pas se poser de questions et de saisir sa chance quand elle se présente. Louis a su le faire.
Que t’inspire l’équipe stéphanoise que tu t’apprêtes à affronter ?
Elle a beaucoup de qualités et peut s’appuyer sur des joueurs d’expérience. Elle a un équilibre qui a été trouvé par Laurent depuis plusieurs semaines. On sent qu’à tout moment il peut se passer des choses…
Les Verts restent toutefois sur deux revers en championnat dont un très lourd à Auxerre. Tu t’attends à les voir revanchards samedi à Geoffroy-Guichard ?
Bien sûr ! On sait que dès l’entame du match, on peut se faire secouer. On va affronter une équipe qui a l’ambition de monter, qui a de la qualité. On a vu leur match de Coupe de France. Alors qu’ils avaient pas mal de joueurs absents, les Verts ont été très bons. Malgré le turn-over, ils ont fait un match sérieux, très cohérent. Cette équipe n’a jamais douté. On sait qu’on va chez un des très gros clients de la Ligue 2 et qu’on devra sortir un grand match pour espérer atteindre voire dépasser la barre des 20 points dès ce week-end. Gaëtan Charbonnier vient de réaliser un doublé, ça va le mettre en confiance car il n’avait pas encore scoré cette saison. C’est l’un des dangers qu’on a identifiés parmi beaucoup d’autres.
Usaï rime avec retrouvailles. Trois joueurs que tu connais bien pour les avoir entraînés seront très probablement titulaires contre tes protégés à GG.
En effet, j’ai travaillé avec Antho Briançon et Lamine Fomba au Nîmes Olympique et j’ai collaboré avec Flo Tardieu quand il était tout jeune à Istres. Antho, je n’ai pu l’aligner que lors des quatre derniers matches de la saison 2021-2022 car il avait été éloigné des terrains près d’un an suite à une blessure qu’il avait eue lors d’un match contre Saint-Etienne [le fameux match gagné aux Costières grâce à un Etienne Green en feu pour son premier match en pro, ndp2]. Au-delà de ses qualités de joueur – j’aime particulièrement son engagement et sa générosité sur le terrain - Antho est un homme de très grande valeur.
Avec Lamine Fomba on a travaillé un peu moins d’un an, il est parti à Saint-Etienne au mercato d’hiver la saison dernière peu de temps après que je me suis fait sortir du Nîmes Olympique... C’est un joueur de très grande qualité, il a tout pour passer au-dessus. Il a cette capacité à casser des lignes par le volume, par la course. Je pense que l’ASSE est le club idéal pour gravir l’échelon supérieur. Lamine doit être un peu plus buteur car il en est capable. J’espère qu’il ne le montrera pas samedi après-midi bien sûr ! (rires) C’est un garçon adorable.
Flo Tardieu, on a travaillé ensemble à Istres il y a une bonne dizaine d’années quand j’étais l’adjoint de José Pasqualetti. Je l’ai connu gamin, au moment où il s’est imposé. Flo a joué très tôt à ce poste de sentinelle à Istres. Il n’avait que 19 ans. C’est un garçon que j’aurai un grand plaisir à recroiser d’autant plus qu’il il a fait un super parcours. C’est un garçon qui a un Q.I. football très élevé. J’ai suivi avec attention sa carrière, que ce soit à Sochaux, à Troyes et maintenant à Sainté où il a retrouvé Laurent.
Laurent qui est l’un de tes camarades de promo…
Oui, on a passé le BEPF ensemble la saison 2017-2018. Dans notre promo, il y avait d’ailleurs Manu Da Costa qui est le principal adjoint de Laurent à Sainté et bien sûr d’autres coaches dont deux entraînent également en Ligue 2 : Omar Daf à Amiens et Didier Santini à Rodez. On a passé des moments intenses avec Laurent, que ce soit sur le plan football mais aussi sur le plan humain. J’ai beaucoup d’affection pour lui. On a eu beaucoup de fous rires mais ça je ne peux pas en parler ! (rires)
Qu'est-ce qui t'a plu dans le BEPF ?
Passer le BEPF, ça permet d’avoir beaucoup d’échanges. C’est une formation qui m’a appris beaucoup de choses. Pas forcément des choses rationnelles mais sur la connaissance de soi-même, dans la capacité à gérer ces émotions, à avoir de la lucidité. Le BEPF est très formateur pour acquérir le bagage complet d’un entraîneur professionnel mais c’est vraiment ce côté « connais-toi toi-même » qui m’a marqué.
Il y a donc du Socrate en toi. Du Socrates aussi ? Es-tu un apôtre du beau jeu ? Quelles sont tes influences en tant qu’entraîneur ?
J’apprécie beaucoup Marcelo Bielsa, bien entendu Pep Guardiola mais aussi Jorge Sampaoli. Je les aime énormément. Après, on a tous envie de produire du beau jeu, d’avoir la possession, d’avoir une équipe qui pétille. Mais il faut aussi être pragmatique. Je préfère le jeu d’attaque, bien entendu, mais c’est tellement réducteur de se qualifier d’entraîneur d’attaque ou de défense… On est toujours en quête d’équilibre. On est surtout dépendant aussi de la matière première que sont les joueurs.
Pour clore notre entretien, quelques mots sur Henri Stambouli, décédé vendredi dernier à l’âge de 62 ans. C’est quelqu’un que tu connaissais bien et qui a beaucoup compté pour toi.
Oui, j’ai été très choqué d’apprendre sa disparition. Il a été mon formateur à l’OM. J’étais stagiaire à l’époque où il dirigeait le centre de formation. On a travaillé ensemble à Istres quand nous sommes remontés en Ligue 2, j’ai été son adjoint dans ce club. J’ai beaucoup appris à ses côtés. Henri m’a transmis beaucoup de choses.
Merci à Nicolas pour sa disponibilité