Pas sûr qu’Aïmen ait l’âge de connaître le répertoire de Charles Trenet. Pourtant mon petit doigt - quoique gelé devant l’infâme copie rendue par les Verts il y a dix jours contre Laval - a encore la force de me dire que s’il le connaissait, il fredonnerait volontiers chaque matin en se rendant à l’Etrat : Que reste-t-il de nos amours ?
Franchement, on peut tous la chanter non ? A l’heure où les saisons noires se succèdent, où notre club se débat sans moyens, sans avenir car sans projet autre qu’une très hypothétique remontée pour sauver les dividendes de Brok et Chnok (au fait, quelqu’un pour leur dire que la remontée ne peut pas être un projet en soi, mais l’aboutissement d’un projet sportif ?), comment ne pas verser dans la nostalgie : que reste-t-il de nos amours, que reste-t-il de ces beaux jours … ?
On va s’arrêter là, déja parce qu’on ne connait pas Trenet sur le bout des doigts (un peu réchauffés depuis hier) ensuite parce que le bourdon est suffisamment bien installé, c’est bon, on a notre dose, comme disait Ben Johnson (ou Keith Richards, débrouillez-vous avec vos références).
N’en rajoutons pas, mais tentons plutôt de répondre à cette fameuse question, histoire de faire le lien avec Aïmen parce que sinon, je sens bien que je vais vous perdre : que reste-t-il de nos amours ?
Ben déjà un une passion, une sévère, une qui s’accroche et résiste à tout, aux humiliations des naufrages historiques, comme à la médiocrité des prestations hebdomadaires, sinon je n’aurais pas été là l’autre samedi, sur mon joli siège vert à pester seul, et à voix haute, durant 90 minutes par 0° en me farcissant en prime le questionnement crétin de mon jeune voisin de tribune :
- on a fait rentrer une fille ?
- ben non c’est Amougou (regard navré appuyé…).
Bref dans une version toute personnelle et moins jupitérienne du quoi qu’il en coûte, je sais déjà que ma passion m’accompagnera ad vitam. Mais, pour les autres, ceux qui, c’est humain, se lassent à force de se désoler, la question de la survie de la passion se pose. Comment la conserver, l’entretenir, la consolider ?
Avec des victoires. Oui certes, c’était facile. Enfin à dire. Parce qu’à obtenir…
Quand elle se fait rare, la victoire, on fait comment ? Ben on cherche tous les motifs de fierté, on pioche dans les réserves de tout ce qui nous attache à ce club. On n’hésite pas à sortir les violons, à jouer sur la corde sensible à rechercher le supplément d’âme. On continue par exemple notre visite du panthéon de la chanson française, en se souvenant des jours anciens, et en pleurant.
Mais la fierté, c’est comme l’amour, ça s’entretient. Alors après les souvenirs, on peut tenter de déceler dans le présent des raisons de s’attacher à ce club. Et c’est là qu’Aïmen arrive, certes avec la tête dans les épaules et son allure de bison, soit pas exactement l’incarnation immédiate du romantisme. Mais Aïmen, c'est d'abord et avant tout une belle histoire, un amour sincère pour le club, un lien indéfectible à la ville, et surtout au-delà de ses qualités et défauts, une énergie jamais calculée au service de ce maillot, et des performances qui font légitimement de lui un titulaire régulier.
Alors au sujet de la navrante absence de projet de nos actionnaires et dirigeants, je leur soumettrais volontiers une proposition, simple, applicable rapidement et probablement populaire : et si on décidait, à niveau sportif équivalent, de mieux payer un mec formé au club qu’un joueur débarqué d’ailleurs, et trop souvent de passage ?
Et si on tirait des conclusions du constat que Monconduit, Charbonnier ou Lobry, qui ont pourtant toujours été dans l’esprit, ont apporté moins sportivement que Moueffek ou Chambost depuis 1 an ?
Et si on cherchait à fidéliser des joueurs choisis notamment parmi les cinq formés au club qui arrivent en fin de contrat (Moueffek, Nadé, Chambost, Pétrot, Rivera) à la fois en appréciant leur niveau de jeu, leur état d’esprit, et ce qu’ils représentent pour les supporters, mais aussi pour Sainté, le club comme la ville ?
Ça aurait pas un peu la tête d’un début de projet, non ? Sans garantie absolue de lendemains qui chantent, peut-être, mais sans risque financier, et avec la certitude, d’offrir un peu de stabilité au club, et de consolider le lien avec les supporters, ce qui a rarement été contre-productif.
Qui à Lens, alors en D2, aurait imaginé que Gradit et Sotoca joueraient un jour la Ligue des Champions sous le même maillot ? Qui à Bollaert ne se réjouit pas de voir ces joueurs représenter depuis 5 ans comme personne l’âme de ce club et sa progression vers les sommets ?
Sablé, Janot, Perrin (tiens tiens…) avaient en leur temps incarné à la fois une fidélité sans faille et la résurrection de Sainté en contribuant aux remontées de 1999 et 2004. Pourquoi les mêmes ingrédients n’auraient pas la même saveur vingt ans plus tard ?
On a perdu des matchs, beaucoup, trop à moins d’un miracle pour sauver cette saison.
On peut encore sauver notre âme, et préparer la prochaine : Prolongez nos Verts !