Ex-joueur de l'ASSE (d'octobre 1990 à juin 1991) et ancien recruteur stéphanois (de mars à novembre 2011), le nouvel entraîneur martégal Thierry Laurey garde de très bons souvenirs de Yunis Abdelhamid, qu'il a lancé en pro à Arles-Avignon.


Quels souvenirs gardes-tu de Yunis Abdelhamid, sur le point de s'engager avec l'ASSE ?

J’en garde des souvenirs superbes, fantastiques. C’est un très bon garçon. Avant de le lancer en pro à Arles-Avignon, je le connaissais déjà. Je l’avais vu jouer en DH quand il jouait dans l’équipe de Lattes, près de Montpellier. Quand je suis arrivé à Arles-Avignon en décembre 2011, il y avait beaucoup de joueurs suspendus ou blessés donc j’ai fait monter Yunis, qui jouait à l’époque en réserve. Je l’ai lancé à Sedan, il a été très bon et il a continué à jouer. On jouait avec une défense à trois, Yunis jouait axe gauche. Il a de suite fait l’unanimité donc il a été titulaire. J'ai pris beaucoup de plaisir à l'entraîner l'année que j'ai passée là-bas.

Vous êtes resté en contacts depuis votre collaboration à Arles-Avignon ?

J’ai toujours suivi Yunis, j’ai toujours gardé d’excellentes relations avec lui. A chaque fois qu’on s’est recroisé, on a eu des échanges sympathiques, respectueux. C’est un garçon qui est intelligent, qui a un master en comptabilité. Il était parti pour être expert-comptable avant d’avoir cette opportunité de découvrir sur le tard le foot professionnel. Quand je l’ai fait débuter en Ligue 2, il avait déjà 24 ans. Yunis, c’est un garçon doté d’une excellente mentalité, équilibré. C’est un leader dans l’âme, il sait prendre ses responsabilités. Yunis, c’est vraiment quelqu’un de bien !

Tu t’attendais à le voir s’imposer si durablement dans l’élite ?

Pas forcément. Sa première saison à ce niveau, à Dijon, ne s’était pas passée comme il l’espérait. Mais ce qu’il a réussi pendant toutes ses années à Reims, c’est vraiment extra. Il vient de faire 7 saisons pleines dans ce club dont 6 en Ligue 1. Quand je le voyais jouer arrière gauche à Lattes en R1, je le trouvais largement au-dessus. J’avais coché son nom. Je m’étais dit : « si un jour… » En fait je n’ai même pas eu besoin d’aller le chercher car il était déjà à Arles-Avignon. L’entraîneur qui est venu prendre la réserve d’Arles-Avignon, Yohann Febrer, c’était l’ancien entraîneur de Lattes.

Quelles sont les principales qualités de Yunis ?

Yunis est quelqu’un de très humble. Comme il est travailleur et à l’écoute, il a progressé rapidement. C’est un vrai défenseur. Dans les duels, il est dur. Certes, il a pris de l’âge mais quoi qu’il en soit, il est toujours dur. Il sort bien les ballons, il ne panique pas sous pression. Il a un très bon jeu de tête, il marque des buts sur coup de pied arrêté. C’est un joueur intéressant car il a une intelligence de jeu. Il sent les choses, occupe les bonnes zones. Il sait où aller et il sait garder la tête froide. Il a beaucoup de qualités, Yunis !

Moi, si j’avais repris un club en Ligue 1 ou à l’étranger, je l’aurais bien pris. J’aurais aimé avoir un joueur pareil. C’est de l’or en barre. Saint-Etienne a fait un très bon coup en le recrutant. Et je ne dis pas ça seulement parce que c’est quelqu’un que j’aime bien et que j’ai lancé. Après, il faudra voir par rapport à son âge combien de temps il lui reste pour performer au niveau où il s’est hissé avec le Stade de Reims. Avec l’âge, il arrive malheureusement que des qualités s’envolent. Parfois, tu es rattrapé par le temps qui passe.

Parfois, le temps qui passe met du temps à te rattraper. On l’a vu avec Hilton, on le voit avec Dante.

C’est pas faux ! Après, ces mecs sont des exceptions. Comme eux, Yunis est un mec très sérieux, qui a un hygiène de vie au top, c’est d’ailleurs pour ça qu’il est encore titulaire en Ligue 1 aujourd’hui. Après, il est arrivé sur le circuit plus tard que les autres, il ne s’est pas usé dans un centre de formation, il ne s’est pas dispersé. C’est un passionné, on sent qu’il a encore faim et ce plaisir de jouer. Je n’ai pas l’impression qu’il ait le moindre signe de lassitude ou d’usure mentale. Il n’a pas été conservé par le Stade de Reims mais n’a pas tardé à retrouver un club qui va lui permettre de poursuivre sa belle aventure dans l’élite. Pas n’importe quel club en plus !

Yunis s’apprête en effet à rejoindre l’ASSE d’Olivier Dall’Oglio. Un jeune sexagénaire que tu connais bien, de trois mois ton cadet…

C’était mon camarade de chômage, on se rencontrait à la Grande-Motte car on a un ami commun là-bas. On mangeait de temps en temps ensemble. On s’est retrouvé à Strasbourg le jour où il a signé à Saint-Etienne. Avec Olivier, on avait été invités avec les anciens du Racing Club de Strasbourg.

T’étais en balance avec lui pour reprendre les Verts, non ?

J’ai lu ça mais c’est des conneries. J’en profite pour remettre l’église au milieu du village. Je n’ai jamais été contacté par Saint-Etienne car une personne au club a fait barrage. Et ce n’était pas le président ou un dirigeant. C’était quelqu’un qui est dans l’ombre, qui, lorsque j’ai travaillé à Saint-Etienne comme recruteur, en a pris ombrage car il voulait le poste. C’est un petit règlement de comptes. Dans le milieu du football, c’est classique. J’ai lu que j’étais le choix numéro un, que Roland Romeyer me voulait mais je n’ai reçu aucune proposition de qui que ce soit. Mon agent n’en a pas reçu non plus pour une raison simple : je n’ai pas d’agent ! (rires)

Entraîner les Verts, ça aurait été avec plaisir mais je suis content pour Olivier. Il a fait du très bon boulot, il a réussi à ramener l’équipe où il fallait. Je suis très content que l’ASSE retrouve la Ligue 1. Après, contre Metz, il faut reconnaître que ça a été un peu limite. Sainté a eu un peu de réussite. Disons que les Messins ont tendu le bâton pour se faire battre. Sur les deux matches, ils ont quand même facilité la tâche aux Stéphanois. Ils ont fait des erreurs à l’aller et se sont retrouvés en infériorité numérique au bout de 5 minutes de jeu au retour. C’est difficile dans de telles conditions de t’en sortir dans un barrage.

Il n’en demeure pas moins que l’ASSE n'a pas volé son retour dans l'élite et je m’en réjouis. Bravo à Olivier, à son staff et à tous ses joueurs. Après avoir manqué de peu la montée directe, ils ont su s’arracher pour remettre Saint-Etienne est à sa place. Je suis content aussi pour tous les supporters, pour tous les amoureux des Verts. Quel public ! Tout le monde est content de revoir les Verts en L1. Après, le club sait que ça va être compliqué. Même si c’est Saint-Etienne, c’est un club qui était en Ligue 2. Même avec un budget conséquent et des joueurs de qualité, c’est pas évident. Il n’y a plus que 18 clubs en Ligue 1.

Le club a été racheté par un milliardaire, est présidé par un ancien dirigeant d’Arsenal et du Milan AC et disposera certainement de moyens pour être compétitif en Ligue 1. Tous les voyants semblent au vert, non ?

On va voir ce que ça va donner. Moi, j’évite de parler avant car il y a souvent beaucoup de surprises. C’est l’expérience qui me fait dire ça. J’espère de tout cœur que Sainté sera à la hauteur, que l’équipe portera haut les couleurs du club. J’espère que ça fonctionnera mais les Verts arrivent de Ligue 2, il ne faut pas l’oublier. L’effectif n’est pas le même que certaines équipes de Ligue 1.

L’effectif actuel est effectivement assez loin de certaines équipes de Ligue 1 mais Sainté va certainement recruter pour aborder au mieux son retour dans l’élite.

Je l’espère, il y a forcément des renforts qui vont arriver. Yunis en est un à mon sens. Pas mal d’autres recrues vont probablement débarquer, sans doute assez tôt vu les moyens dont disposent les nouveaux investisseurs. Après, ça ne veut pas dire qu’ils ne feront pas des erreurs. Il faut faire attention quand même. Yunis, on sait que c’est quelqu’un de fiable et qui a une solide expérience de la Ligue 1. Après, il faudra voir ce qui va se faire à côté. Bien sûr, ils vont faire venir des jeunes joueurs en se basant sur les datas, c’est la mode. Mais la data peut te faire descendre aussi, il faut faire attention. Il faut toujours être vigilant, ne pas baisser la garde. Mais je fais confiance à Olivier pour ça.

 

Merci à Thierry pour sa disponibilité