Rendant un vibrant hommage à ses anciens coéquipiers Salif Keita et Georges Bereta, l'ancien ailier Patrick Parizon, impressionné par la ferveur du public stéphanois, n'est pas près d'oublier la soirée qu'il a vécue lundi soir à Geoffroy-Guichard...


"J’ai vécu une superbe soirée. Il y avait une éternité que je n’étais pas venu à Geoffroy-Guichard, ça m’a fait un bien fou de vivre toutes ces belles émotions dans le Chaudron. Je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait un engouement pareil pour un match de Ligue 2 un lundi soir. Je m’attendais bien sûr à une belle ambiance mais pas à ce niveau-là. C’est extraordinaire ! J’en ai eu des frissons. Ça m’a donné la chair de poule ! Le nombre de supporters, leur enthousiasme… Purée, c’est impressionnant ! Il y a longtemps que je n’avais pas vécu ça. J’ai aimé les retrouvailles avec ce fabuleux public, avec mes anciens coéquipiers, cela faisait très longtemps que je ne les avais pas vus. C’était une merveilleuse soirée. Un rêve.

Je n’avais hélas pas pu me libérer pour venir à Saint-Etienne lorsque le club a rendu hommage à Georges Bereta à l’occasion du match de Valenciennes. Je suis content d’avoir pu faire le déplacement depuis chez moi près de Niort pour rendre hommage à Salif Keita. Salif, c’était un frère. On est arrivé pratiquement ensemble à Saint-Etienne, en 1967. J’ai quitté le club en 1973, un an après lui. J’ai vu Salif arriver à Sainté dans son fameux taxi qu’il avait pris à Orly. J’étais au siège du club à l’époque, rue de la Résistance. Le chauffeur de taxi s’est arrêté, il a dit : « voilà, je vous amène un joueur de football ». C’est Monsieur Paret qui a réglé cette course hors norme. Un truc de fou !

Salif aussi était hors norme sur un terrain. Un truc de fou ! Quel talent incroyable il avait ! Salif et moi, on n’habitait pas loin l’un de l’autre, on se voyait souvent. On a même été à la fac de droit pendant un moment ensemble. Comme il débarquait, je me suis occupé un petit peu de lui. J’ai eu la chance de côtoyer de très grands joueurs chez les Verts. Salif, c’était le summum. C’était un joueur exceptionnel, un garçon exceptionnel. C’était un bon copain, il était d’une gentillesse et d’une humanité incroyables ! Il s’est adapté très rapidement. C’était un type formidable. Formidable ! Salif, c’était une très forte individualité, il faisait des différences vraiment énormes, tout en sachant aussi se mettre au service du collectif. Salif était technique, rapide. Il était insaisissable, il avait le sens du but.

Salif, c’était la classe, tout simplement ! Ce qui est incroyable, c’est que lors de la victoire 5-0 en finale de Coupe de France 1970 contre Nantes, Salif n’a pas marqué. Alors que je n’ai marqué qu’une douzaine de buts sous le maillot vert, j’ai ouvert le score lors de ce match. Je n’étais pas spécialement un buteur mais plutôt un passeur. J’aimais bien déborder et faire marquer. Salif n’a pas scoré ce jour-là mais il a encore excellé, il a délivré plusieurs passes décisives, c’est grâce à lui que Hervé Revelli a mis les deux deniers buts. Cette saison-là, on a fait le doublé et Salif a mis près d’une trentaine de buts en comptant les matches de Coupe. La saison d’après, rien qu’en championnat, il en a mis 42. Mais c’est Skoblar qui a fini meilleur buteur avec 44 buts. Salif était fou ! (rires) Salif était un frère, Georges aussi. Ça m’attriste beaucoup qu’ils soient partis tous les deux cet été.

On était vachement proche l’un de l’autre avec Georges. On s’entendait bien, on s’appréciait bien. C’était un mec extraordinaire. Ah, Georges ! Ça m’a vraiment fait mal de ne pas pouvoir me rendre disponible pour l’hommage qui lui a été rendu il y a deux mois. Je l’aimais tellement… On est parti plusieurs fois en vacances ensemble, on a vécu des moments inoubliables. On a fait la fête sur le terrain en premier lieu mais aussi en dehors. Je me souviens d’une fête mémorable après notre doublé en 1970 dans la maison de Roger Rocher à Saint-Genest Malifaux. On avait bien festoyé, j’avais redescendu Jo chez lui, on était bien ! (rires)

Georges était humainement quelqu’un d’exceptionnel. Simple, franc, boute-en-train, généreux. Il était aussi d’une grande générosité sur le terrain. C’était un garçon puissant, combatif, qui donnait tout pendant 90 minutes. Quelle débauche d’énergie ! C’était quelque chose ! Georges s’arrachait, il se défonçait. Il avait un volume de jeu extraordinaire. C’était un coéquipier très apprécié, il se donnait corps et âme pour l’équipe. Il aura marqué beaucoup plus de buts que moi et je n’oublie pas non plus toutes ses passes décisives, qu’on ne comptabilisait pas aujourd’hui comme on le fait aujourd’hui avec toutes ces stats dont on nous bombarde. Je n’oublie pas d’ailleurs que c’est grâce à Jo que j’ai marqué contre Nantes en finale.

Jo, physiquement, je le trouvais impressionnant. Et sur un terrain, ce n’était pas le genre à se dégonfler. C’était un garçon intrépide et impavide. Il n’avait peur de rien et n’était pas du style à se laisser intimider par les défenseurs rugueux. Je me rappelle encore ses duels avec Raymond Domenech lors des derbys. Les deux ne donnaient par leur part au chat ! (rires) Il fallait voir comme ils y allaient ! Il ne fallait pas qu’il y en ait un qui cède. Ils se tiraient la bourre comme pas possible. Leurs duels très virils étaient impressionnants à voir, invraisemblables ! Jo avait une volonté et un tempérament qui forçaient mon admiration. Et à côté de ça, c’était un garçon charmant, le cœur sur la main.

Le jour où le club a rendu hommage à Jo, on a appris la disparition de Salif. Lundi, j’ai été très ému par la minute de silence en l’hommage de Salif. C’est très rare de ne pas entendre le moindre bruit lors d’une minute de silence dans un stade. Mais là, tout le monde a respecté parfaitement cette minute de silence. C’était beau, c’était prenant, c’était poignant ! Chapeau à ce merveilleux public ! C’est dire l’immense respect que tout le monde avait pour Salif. Il y a ceux qui ont eu la chance comme moi de jouer à ses côtés, ceux qui ont eu le bonheur de le voir jouer, et ceux qui sans l’avoir vu à l’œuvre savent ce qu’il représente. C’est notamment le cas des supporters qui ont fait ce magnifique tifo déployé dans le kop sud. C’est formidable de voir ça ! Waouh !

Salif a reçu un hommage très mérité à la hauteur de son talent. Ce joueur a donné beaucoup de plaisir, c’était un vrai bonheur de l’avoir avec nous. De là-haut je pense qu’il a dû apprécier aussi le match que les Verts ont fait contre Angers. C’était un match de qualité, rythmé, plaisant à regarder. La première période était équilibrée, il ne faut pas oublier que le SCO a eu deux ou trois belles occasions d’ouvrir le score, heureusement Etienne Green et Léo Pétrot veillaient au grain. Après, les Verts ont pris le dessus. En seconde période, ils ont eu le savoir-faire de marquer et ensuite de bien gérer leur avantage, sans subir les assauts angevins. Le public a beaucoup poussé l’équipe, je me répète mais c’est extraordinaire d’avoir de tels supporters !

Quel public exceptionnel, mes enfants ! C’est fou de voir plus de 27 000 personnes un lundi soir mettre une telle ambiance dans un match de deuxième division. Non seulement les supporters sont très nombreux mais ils sont très bruyants, ils portent leur équipe, l’encouragent sans cesse, chantent tout le match en son honneur. Pendant une heure et demi non-stop, ils donnent de la voix. Même en première division, il n’y a pas de public comme ça. Bon, il y en a peut-être un ou deux, à Lens notamment. Pour en revenir au match, j’ai beaucoup apprécié que chaque joueur se mette au service du collectif. Je n’ai pas envie de ressortir un joueur en particulier, c’est le collectif que je veux mettre en exergue. J’ai vu des Verts jouer en équipe. Je les ai trouvés entreprenants et solidaires.

J’ai bien aimé ce que j’ai vu lundi soir et j’espère que ça augure de très belles choses pour la suite de la saison. Autant à la télé certains matches des Verts ne m’avaient pas emballé, autant en début de semaine j’ai vu un vrai bon match, j’ai vu une vraie équipe. Cette équipe a connu un tout début de saison difficile mais depuis elle est sur une très bonne série. Ça me fait très plaisir de voir que les Verts sont remontés à la deuxième place. J’espère qu’ils vont poursuivre sur leur lancée. S’ils montrent autant de cœur que contre Angers, s’ils continuent de faire les efforts les uns pour les autres, je ne vois pas pourquoi ils ne finiraient pas dans les deux premiers. J’insiste, ils ont en plus la chance d’avoir ce douzième homme. Ce public… Pop pop pop pop !"

Merci à PaPa pour sa disponibilité