Il y a 10 ans, les U17 de Gilles Rodriguez et Lionel Vaillant étaient sacrés champions de France. Le nouvel entraîneur d'Espaly (N3) revient pour nous sur cette belle aventure sportive et humaine.


Lionel, 10 ans après, quels souvenirs gardes-tu de ce titre de champion de France U17 ?

Au-delà du titre – un titre, ça reste un titre, personne ne pourra nous l’enlever – je garde les relations qu’on a tissées et le fait d’avoir toujours des contacts avec la plupart des joueurs. La plus belle récompense, c’est celle-là. Quand tu croises un joueur que t’as eu, que ce soit sur les terrains ou en dehors, même par message, il y a toujours ce respect qu’on a eu au quotidien quand on a fait la saison. De voir que les gars ne t’ont pas oublié, ça fait plaisir. Le titre, c’est bien mais les relations humaines, c’est ce qu’il y a de plus fort !

Gilles Rodriguez ne te contredira pas. Peux-tu nous rappeler la naissance de votre collaboration à la tête des U17 ?

J’étais en train de passer le DES donc le BE2 que le club m’avait payé. Cette formation permet d’entraîner dans les clubs pros les U17 nationaux, les U19 nationaux voire la réserve. A cette époque-là, Romain Revelli bascule adjoint avec Christophe Galtier. J’étais dans ma dernière semaine d’examen, en train de passer mon diplôme. Jean-Philippe Primard était à cette époque le directeur du centre de formation. Il m’a dit qu’il aimerait bien m’associer à Gilles Rodriguez. Je connaissais peu Gilles car j’étais en préfo, on se disait bonjour sans plus. La préfo c’est différent du centre de formation, avec les U13 on s’entraînait au centre mais plutôt le soir. On se croisait avec Gilles mais sans se connaître vraiment.

J’ai tout de suite accepté de travailler avec Gilles. On a appris se connaître et on a défini les contours de notre collaboration, les rôles de chacun. Quand tu te retrouves à co-entraîner alors que t’as toujours été habitué à coacher tout seul, ce n’est pas évident. Heureusement ça a matché tout de suite avec Gilles. Il m’a dit clairement : « c’est toi qui viens d’avoir les diplômes, t’as découvert des nouvelles choses, moi je suis ouvert à ce que tu vas proposer. » On a la même philosophie, la même entente au niveau des valeurs qu’on partage, de ce que l’on attend des gamins. On est très axé sur l’aspect humain. Gilles est un formateur hors pair, il est remarquable humainement.

Tous les anciens joueurs qu’il a eus comme Loïc Perrin sont unanimes à son sujet. On en a discuté récemment avec Carl Medjani. Pour eux, Gilles Rodriguez était leur père quand il était au centre de formation. J’ai ressenti ça aussi en ayant la chance de collaborer avec Gilles. C’est comme si j’étais le petit du centre de formation. Il m’a pris sous ses ailes et c’est devenu plus qu’un ami. Moi j’ai perdu mon père très jeune. Comme je l’ai dit à Gillou, « pour moi t’es mon père. » C’est plus que de l’amitié. On s’appelle une fois par semaine, on mange ensemble régulièrement. Mickaël Dumas se joint à nous quand il redescend de Rennes, Alain Blachon aussi. On se fait des bouffes régulièrement.

Il vit où Gillou ?

Il est basé à Saint-Bonnet-les-Oules, à côté de Saint-Galmier. Gilles a été prépondérant dans notre réussite et je veux également souligner l’apport de René Dumas qui était notre dirigeant. René a toujours baigné là-dedans par l’intermédiaire de ses fils, que ce soit Mick ou Julien. Les deux sont passés par le club de l’ASSE. Quand Gilles et moi avons pris l’équipe, nous n’avions plus de dirigeant. Gilles connaissait bien René, on l’a sollicité et il a accepté. René est un bénévole, il vient gratuitement en plus de ses heures de boulot. C’était un confort pour nous. On s’occupait du terrain, il s’occupait des maillots, de la tablette, des feuilles de match.

Son détachement a été précieux. Avec Gilles, on était focus sur les entraînements. Certaines semaines se passaient moins bien que d’autres avec certains joueurs qui ne voulaient pas bosser. René était capable de récolter des infos pour nous, de passer derrière en disant « allez les gars, c’est pas grave, les coaches ont raison. » Avec Gilles on était là pour taper sur les doigts des joueurs pour les faire avancer, René intervenait derrière pour arrondir les angles et encourager les jeunes. On formait vraiment un trio René, Gilles et moi.

Parmi les joueurs sacrés champions de France U17 sous votre houlette, deux d’entre eux sont revenus au club cette saison et ont joué cette saison en L2 : Dylan Chambost et Léo Pétrot. Tu connais le premier depuis très longtemps car il faisait partie de ton équipe qui a remporté le titre de champion de France U13 en 2010 !

Oui, Dylan fait partie de cette génération 1997 qui a remporté ce titre à Capbreton. C’était d’ailleurs le capitaine. Il a grandi sur le tard, l’année du titre en U17 Dylan faisait encore bébé, sa croissance s’est accélérée après. Dylan, c’est le gars du coin, qui vient de Veauche. Il a une très bonne famille, il a été très bien éduqué. Il ne bronchait pas, était un peu réservé d’ailleurs. Il avait déjà une sacrée patte gauche en U13. Il avait vraiment un bon pied, il voyait bien le jeu. C’était un garçon top à entraîner. Je l’ai eu en U13 et j’ai eu le plaisir de l’avoir deux saisons en U17 car l’année où a gagné le titre il n’était que première année.

Dylan n’a pas pris part à la finale remportée contre Guingamp, il est resté sur le banc mais cette saison là il a joué une bonne quinzaine de matches. C’est bien sûr un garçon dont j’ai suivi avec une particulière attention le parcours - un peu atypique - qu’il a eu. Il avait signé pro à Sainté mais il n'avait fait qu'une apparition ou deux en Coupe. A Troyes, il a pu retrouver son entraîneur de la réserve Laurent Batlles. Laurent lui a fait confiance, Dylan a pu s’exprimer en Ligue 2 à l’Estac. Il a souvent été titulaire là-bas l’année de la montée. Avec Dylan on est resté en contact, on s’envoie régulièrement des messages et on s’appelle régulièrement.

Alors que je n’ai jamais demandé de maillot à qui que ce soit, j’ai eu la surprise un jour de découvrir dans ma boîte aux lettres une grande enveloppe. Dedans il y avait le maillot de Dylan dédicacé avec le message : « Coach, c’est mon premier maillot pro en Ligue 2, il est pour vous, merci pour les années passées ensemble. » Tu ne peux qu’être touché par un tel geste de reconnaissance. Au-delà du titre, ce sont ces liens très humains qui m’intéressent le plus. Moi ça fait longtemps que je suis sorti du circuit, que je ne travaille plus dans un club pro. Mais les gamins ne t’oublient pas. Ça veut dire que t’as véhiculé de bonnes valeurs, c’est important.

Dylan sort d'une saison un peu compliquée. Quand Laurent a essayé de mettre son système en place, ça n’a pas très bien fonctionné au départ. Dylan a eu du mal à trouver sa place. Mais Dylan a continué de bosser, c’est quelqu’un qui ne lâche rien. Sur la fin de saison, il a retrouvé du temps de jeu et a montré des choses intéressantes, il a été impliqué sur certains buts. Je pense que la saison prochaine, avec l’osmose que le coach a su créer, Dylan va pouvoir gratter du temps de jeu et avoir quelques bons moments. Cette saison a été dure, je l’ai eu plusieurs fois au téléphone. C’est pas évident quand tu ne joues pas alors que tu étais un des artisans de la montée de ton précédent club. Il a quand même montré sur quelques rencontres la vista qu’il a avec son pied gauche. Quand l’équipe tourne bien, c’est top pour lui. Mais c’est compliqué de revenir dans son club formateur et de s’y imposer.

Léo Pétrot a su le faire, il a d’ailleurs été le deuxième joueur le plus utilisé par Laurent Batlles cette saison derrière Jean-Philippe Krasso. Quels souvenirs gardes-tu de ce garçon, titulaire lors de la finale du championnat de France U17 contre Guingamp ?

Je garde de très bons souvenirs de Léo et on se revoit de temps en temps car j’habite à Yssingeaux et Léo a encore pas mal d’attaches familiales à Monistrol. Il revient régulièrement là-bas où vivent ses parents et où son grand frère Pierre est le capitaine du club local, promu en R1. On se croise souvent avec Léo. Comme Dylan, c’est de la crème à entrainer. Ce sont des garçons très respectueux de ce que tu leur proposes. Il n’y a pas un mot plus haut que l’autre. Léo venait de l’Olympique de Saint-Etienne. C’était sa première année au club. Comme Dylan, c’était un 1997. Être sacré champion de France dès ta première année au centre de formation, c’est une belle entrée en matière ! (sourire)

Léo a eu un parcours encore plus atypique que Dylan quand j'y repense. Il a rebasculé sur du foot amateur à Andrézieux. Quand il va à Lorient, on lui dit qu’il sera le 4e ou 5e défenseur central de l’effectif mais qu’il pourra s’entraîner un peu avec les pros. Mais il y a eu une cascade de blessures, Léo a saisi sa chance. Il a fait un bon match et après c’est parti, il a enchaîné les matches sous les ordres de Christophe Pélissier ! Parfois, une carrière se joue à rien. Mais Léo mérite tout ce qui lui arrive. Il n’a rien lâché, que ce soit au niveau amateur ou au niveau pro. En plus c’est magnifique ce qu’il vit ! T’es de Monistrol, tu joues à Geoffroy. Beaucoup doivent en rêver, lui l’a fait !

Léo a vécu une saison un peu à l’image de son équipe. Après un début de saison très délicat et un peu timide, il s’est affirmé. Le mérite lui en revient bien sûr mais aussi au coach Batlles. Laurent connaît très bien Dylan et Léo, ils lui avaient donné satisfaction quand il entraînait la réserve. Il les a fait revenir à Sainté quand il a pris l’équipe première. J’apprécie le coach Batlles, aussi bien l’homme que le technicien. Chaque année, il venait avec Troyes se préparer au Chambon. C’est à côté de chez moi donc souvent j’allais voir Dylan et je restais un peu le soir à discuter avec le coach. J’aime sa philosophie de jeu. Je n’oublie pas que lorsque mon aventure stéphanoise s’est hélas arrêtée, en dehors de Gilles, c’est l’un des seuls qui prenait contact, qui me demandait comment j’allais. Ce sont des choses qui marquent…

Je me souviens aussi qu’il a su construire patiemment sa carrière d’entraîneur, il a fait ses armes sans griller les étapes avec autant d’humilité que de détermination. Il a démarré en prenant les U15 avec Philippe Guillemet. Il a réattaqué en même temps que nous sauf qu’il n’avait pas encore les joueurs U15 car ils étaient encore en vacances. Du coup il est venu avec nous sur la catégorie U17. Laurent nous a donné un coup de main sur la prépa. On a beaucoup échangé, notamment sur le rôle des milieux de terrain. C’était son poste de prédilection donc il avait beaucoup de choses intéressantes à nous dire. C’était très formateur. Encore aujourd’hui il nous arrive d’échanger des textos. J’aime bien discuter foot avec lui.

Alors qu’il avait davantage joué qu’Alexis Guendouz cette saison du titre, Emeric Brun a arrêté le foot dans la foulée pour se consacrer à ses brillantes études.

On avait en effet deux très bons gardiens qui ont eu tous les deux un temps de jeu conséquent. Il y avait une vraie concurrence entre eux, une concurrence saine et loyale. Avec Gilles on a eu du mal à faire un choix pour la finale. On leur a dit qu’on ferait le point à l’issue de leur semaine de travail. Deux jours avant la finale, on leur a demandé ce qu’ils avaient pensé de leur semaine d’entraînement. Comme on avait deux garçons qui avaient la tête sur les épaules et qui savaient s’évaluer, Emeric nous a dit : «sur la semaine qui vient de s’écouler, je suis en dessous. » On est tombé d’accord avec lui, notre choix s’est porté sur Alexis. Ça s’est fait en bonne intelligence, on ne voulait pas qu’il y ait d’embrouilles. Emeric a dit clairement qu’Alexis méritait de jouer la finale. C’est ce qui s’est passé, Alexis a fait d’ailleurs une bonne finale sous les encouragements d’Emeric.

Emeric, ça fait vraiment un bail que je n’ai pas discuté avec lui mais ça me ferait très plaisir de le revoir. Il avait vraiment l’objectif de faire une école d’ingénieurs. C’était planifié dans sa tête. Autant il y en a qui hésitent car leur passion reste le foot, autant Emeric a clairement tranché en faveur des études. Il a très bien compris qu’il ne pouvait pas viser une des plus prestigieuses écoles d’ingénieurs en France tout en continuant à jouer au foot dans un club comme le nôtre. Il avait décidé d’arrêter le foot bien avant la finale. Il avait un an d’avance à l’école. Après avoir quitté l’ASSE, Emeric a fait une prépa au lycée Claude Fauriel de Saint-Etienne puis à Grenoble et il a réussi à intégrer Centrale Paris. Il a travaillé près d'un an à Stockholm. Et je crois que depuis quelques années il bosse à EDF en tant qu’ingénieur R&D.

Au centre de formation, on a parfois des garçons vraiment doués pour les études et travailleurs. Comme Emeric, le milieu de terrain Geoffrey Jencel, qui a joué aussi quelques matches cette saison du titre, a privilégié ses études au football deux ans plus tard après avoir obtenu son bac scientifique avec mention. Il a fait une classe prépa à Valence, avant d'intégrer l'ENSGTI, une école d'ingénieurs basée à Pau. Je crois qu'il bosse désormais à la centrale nucléaire de Cruas-Meysse.

Quant à Alexis, on est resté un peu en contacts mais ça fait un petit moment que je ne l’ai pas eu. Ceci étant, je suis bien sûr sa carrière de joueur. Il a été un des artisans de la montée de Pau en L2 en enchaînant deux saisons pleines quand Sainté l’avait prêté là-bas. Depuis trois ans il montre ses qualités en Algérie. Il est titulaire dans les cages du CR Belouizdad, qui enchaîne les titres de champions depuis plusieurs saisons. Et il a vécu une belle aventure en équipe nationale algérienne lors du championnat d’Afrique des Nations. Il a été très solide et ne s'est incliné qu'aux tirs au but en finale.

Je suppose que tu as des contacts plus fréquents avec les défenseurs titularisés aux côtés de Léo Pétrot lors de la finale remportée contre Guingamp il y a dix ans car ils sont dans la même région que toi.

En effet, je recroise de temps en temps Clément Cabaton, qui joue à Andrézieux, une équipe que je vais parfois voir jouer. J’ai souvent Clem’ par message. Comme Dylan, c’est un garçon que j’ai eu en U13 à l’ASSE avant de le retrouver en U17. Joris Mendy m’appelle à chaque fin de saison, parfois il cherche un nouveau projet. On échange. Il vient d’enchaîner 4 saisons en N2, les deux premières avec la réserve de Lorient et les deux dernières avec Lyon la Duchère. Nathan Dekoké, je l’ai revu avec plaisir cette saison car il a joué contre Le Puy en National avec Bourg-Péronnas. Son club a été relégué sportivement en N2 et vient d’être rétrogradé par la DNCG en N3. La saison précédente, il avait été titularisé une bonne vingtaine de fois en Ligue 2 à QRM.

Le capitaine Guillaume Dauphin a un peu disparu de la circulation après ce titre. T’as de ces nouvelles ? Que lui a-t-il manqué pour évoluer plus haut ?

Je revois Guillaume, il est dans le foot amateur. Cette saison il jouait en R2 à Savigneux-Monbrison. Il a fait un beau parcours en Coupe de France, vous en avez d’ailleurs parlé sur Poteaux Carrés, un site dont je suis resté un fidèle lecteur. L’équipe de Guillaume est allée jusqu’au 7e tour, son parcours s’est arrêté sur un derby perdu contre Roche-Saint-Genest, qui espérait affronter Sainté au 8e tour mais Rodez a éliminé les Verts à Geoffroy... Guillaume, je l’avais fait venir au Puy en 2020, il avait joué une saison avec moi en réserve.

Je pense qu'il n’a pas réussi à évoluer plus haut car à un moment donné il s’est un peu perdu, il est un peu tombé dans le showbiz. Il voulait se lancer dans la mode tout en continuant le foot. Il a fait trop de choses, il s’est un peu éparpillé. Il est parti à Monaco, il a joué avec l’équipe 3 là-bas en Seniors. Il a aussi fait un bref passage en National 3 du côté de Tours. Le club du Puy lui a mis le pied à l’étrier, lui a trouvé un boulot donc maintenant il bosse dans cette boite. Il s’y épanouit, il y est bien. Il bosse dans tout ce qui est signalétique. Guillaume est commercial là-bas, il est basé à Andrézieux. Il travaille à Oxeo, la boite de Grégory Durieu, qui a été président du club d’Andrézieux.

Je revois souvent Guillaume, je l’ai régulièrement au téléphone. Avec Gilles, on l’avait nommé capitaine d’abord car il correspondait aux valeurs qu’on voulait transmettre au groupe. C’était un joueur très combatif, il en lâchait jamais rien. Ce n’était peut-être pas le plus technique mais il se mettait au service de l’équipe. C’était un meneur, c’est lui qui incarnait le leadership.

Comme l’avaient souligné les potonautes Olaf et Sylvain42 dans leur analyse de la finale, Alexandre Assaf avait apporté beaucoup de qualité au cœur du jeu par sa technique, par ses déplacements et par son pied gauche. Qu’a-t-il manqué à ce joueur talentueux pour aller plus haut ?

Alex, il lui a clairement manqué le mental. Il aurait eu un peu plus de mental, il passait. La qualité technique et la patte gauche qu’il a, je n’en ai jamais vues comme ça. Il était capable de débloquer des situations. Je me souviens d’un match où il nous avait tellement cassé les pieds la semaine qu’on l’avait mis remplaçant. On perd 1-0, on le fait rentrer, il fait une passe dé et il marque derrière. Alex c’est le talent mais il fallait qu’il ait envie. Il était tellement boudeur qu’il était capable de te plomber un match ou une séance d’entraînement.

Alex en est conscient, il a manqué de maturité. Il s’éclate dans le milieu amateur, il marque une quarantaine de buts par saison. Il a fait le bonheur de Firminy et désormais il régale à Monistrol, il a été un des grands artisans de la montée en R1 de ce club cher à Léo Pétrot. Alex joue d’ailleurs avec Zachary Ez Zahouani, qui a pris part à quelques matches en U17 la saison du titre. Alex a bien changé depuis cette époque-là. Il est devenu papa, il a beaucoup gagné en maturité.

S’il n’a pas fait un grande finale, Allan Saint-Maximin était la star de cette équipe. As-tu gardé des contacts avec lui et que t’inspire son parcours ?

Allan Saint-Maximin s’est expatrié, je n’ai plus trop de nouvelles directes de lui mais je suis bien sûr son parcours. C’est un garçon qui a eu du mal à se fixer les deux ou trois ans ayant suivi son départ de Sainté. Il a un peu joué à Hanovre, il a fait un passage éclair à Monaco, n’est resté qu’une saison à Bastia. Il a enchaîné avec deux saisons à Nice et ça fait quatre ans maintenant qu’il est à Newcastle. J'ai vu qu'il a beaucoup moins joué cette saison que la saison dernière.

Allan, c’était clairement le plus talentueux. Il avait un potentiel assez impressionnant. En un contre un, je n’ai jamais vu ça. Il cassait des reins, il avait des appuis de fou. Il a été très talentueux très jeune, très précoce avec tout ce qui va avec quand on est joueur professionnel. Ça peut te monter à la tête. Son talent lui a permis de faire la carrière qu’il fait aujourd’hui mais je pense qu’avec un peu plus de maturité, il aurait pu faire mieux.

Attention, Allan compte plus d’une centaine de matches en L1, plus d’une centaine de matches en Premier League. Ce n'est pas rien ! Mais avec le potentiel qu’il a, il pourrait être bien plus décisif, encore plus impactant pour son équipe. Il me fait un peu penser à Hatem Ben Arfa. C’est un joueur spectaculaire, talentueux, percutant, mais il n’est pas assez structuré. C’est un joueur qui a du mal à s’insérer dans un collectif.

Tout le contraire de Jonathan Bamba, qui évoluait bien sûr à ses côtés le jour du sacre contre Guingamp il y a dix ans.

Ah, Jo, c’était la classe ! Moins talentueux qu’Allan mais très respectueux des consignes, très structuré, rigoureux, exigeant envers lui-même. A la fin de la finale, tout le monde avait le sourire mais lui faisait la gueule. Avec Gilles on l’attrape, on lui dit : « Oh, Jo, on vient d’être champion de France, là ! » Il répond : « Coach, vous avez vu la finale que j'ai faite ? » On lui dit « Jo, t’as le droit de passer à travers un match mais aujourd’hui il y a le titre, on est champions, savoure ! »

Jo, c’est quelqu’un qui a la tête sur les épaules. Il était tellement déçu de ce qu’il avait donné pour le collectif sur ce match que ça l’avait rongé et il a fait la tronche. Même ses frères qui étaient là à la fin du match lui ont dit « Jo, t’es champion de France ! » Tous ces joueurs-là, pour les dix ans, je leur ai envoyés un message avec la vidéo que le club avait fait sur le titre, un peu comme les Yeux dans les Bleus. Ce sont des bons moments qu’on a tous partagés, ils ont tous répondu « Ah, déjà 10 ans ?! »



Jo, je l’ai régulièrement, on s’envoie des messages. Je ne suis pas surpris de sa trajectoire, il savait où il voulait aller. Depuis qu’il a quitté Sainté il y a cinq ans, il n’a connu que le LOSC. Avec les Dogues, il a été champion de France sous les ordres de Christophe Galtier, il a joué une douzaine de matches de Ligue des Champions. Il vient de quitter Lille avec une nouvelle qualification en Coupe d’Europe, on va voir maintenant quelle suite il va donner à sa carrière.

Lors de la finale, Eliott Gattier a volé la vedette à Allan et Jojo en marquant les trois buts victorieux.

Oui, il a été d'une efficacité redoutable. J'ai revu le match il n'y a pas très longtemps, il n'a pas eu 36 000 occases. J’ai revu récemment Eliott car il habite au Puy. Il travaille dans la musique et est devenu DJ. Sur la fin de son expérience à l’ASSE, il s’est perdu. Quand t’es gamin, que tu claques un triplé en finale de championnat de France 17, que dans la foulée tu intègres la réserve et que tu t’entraînes avec les pros, ça peut te monter un peu à la tête. Il était tout le temps avec Allan, ils se prenaient un petit peu pour des starlettes. Or Eliott avait besoin physiquement d’être à 100% pour faire des bonnes performances. Allan n’en avait pas besoin car il avait un talent hors norme dans les pieds.

Eliott devait faire beaucoup de courses, être au top physiquement pour performer. Quand tu commences à faire autre chose que du foot à côté, que tu ne t'imposes pas une certaine hygiène de vie, que t’as moins de récupération, tu te blesses. J’ai envoyé Eliott à Bastia car j’avais un collègue du centre de formation là-bas. Il l’avait pris mais Eliott n’est resté qu’une saison en Corse, il n’a joué qu’une dizaine de matches car il s'est à nouveau blessé. Il a fini à Montluçon en N3 et après il a décroché. Mais Eliott est un bon garçon, aujourd’hui il s’éclate en mixant dans des boites.

 

Merci à Lionel pour sa disponibilité