Une nouvelle saison débute : voici une analyse du style de jeu stéphanois lors de la réception de Lorient.
Le onze de départ pour la première journée était assez facile à deviner après les matchs de préparation. Il n'y avait pas beaucoup d'autres options à la disposition du staff stéphanois, les autres titulaires potentiels étant suspendus (Neyou), à l'infirmerie (Gourna, Moueffek) ou en retard sur leur préparation (Trauco, Hamouma, Nordin). Mais si les protégés de Claude Puel ont évolué lors des derniers amicaux plutôt en 4-3-3 (Aouchiche en milieu axial relayeur, Abi sur l'aile droite), contre Lorient c'était un 4-4-2 très classique qui a été proposé :
La paire des défenseurs centraux a été Moukoudi - Nadé, Kolo a été utilisé en latéral gauche, pendant qu'Aouchiche était ailier droit et Khazri et Abi ont joué ensemble en pointe. Les principaux changements ont été du post pour poste : Hamouma pour Abi, Nordin pour Aouchiche et Dioussé pour Youssouf, à côté du capitaine Camara, au milieu. Quant aux Lorientais, ils étaient dans leur désormais classique 3-5-2.
Le système ne représente pas tout, l'important est comment il est utilisé. Voici quelques exemples.
Hauteur du bloc et espaces entre les lignes
Sur l'image ci-dessus on voit clairement que les Verts proposent un bloc équipe ni trop bas, ni trop haut, et surtout pas trop resserré, avec pas mal de place entre les lignes. Ce qui a pu être exploité par Lorient, comme dans cet exemple après une demi-heure de jeu :
Le 4-4-2 stéphanois est visible, avec ses lignes horizontales, pendant que les Lorientais sont orientés verticalement, les trois milieux axiaux et les deux avant-centres se positionnant de telle manière pour offrir des solutions de passe vers l'avant. Le ballon circule de la gauche à la droite de l'attaque, avec un échange de passes entre deux milieux adverses - le premier rideau défensif Abi - Khazri n'empêche rien. En même temps, deux adversaires se trouve entre les lignes de 4, dans le dos de Youssouf et Camara. Et tout le problème vient de là :
L'avant-centre se positionne comme un 3e milieu axial, même hauteur que deux autres. La paire Youssouf-Camara se trouve en infériorité numérique : le premier en prend un, le deuxième court pour couvrir l'avant-centre et Bouanga quitte son adversaire direct pour resserrer sur le troisième. Abi aussi défend (sur un avant-centre adverse !), ce qui génère ensuite cette configuration insolite :
Un espèce de 4-1-4-1 avec Abi en sentinelle... mais le mal était déjà fait. Le piston gauche lorientais est complètement libre dans son couloir, où il est bien lancé par cet avant-centre qui avait décroché et gardé ensuite le ballon malgré la pression de Camara et Abi. Pire, ce même attaquant suit l'action, ce que les milieux stéphanois ne font pas :
Il est donc trouvé par le centre venant de la gauche complètement libre au point de penalty, entre les deux lignes stéphanoises, reformées. Heureusement, sa frappe rate le cadre de Green.
Relances courtes malgré le pressing
Si quasiment tous les 5m50 lorientais ont été des longs dégagements de leur goal, les Stéphanois ont eu une approche opposée. Ils se sont entêtés à toujours sortir proprement de leurs 30 mètres, même si parfois le pressing adverse était difficile à dépasser :
Dans cet exemple, Maçon joue une touche avec Camara, qui lui redonne le ballon avant de le recevoir à nouveau. Six joueurs de Lorient se trouvent dans ce quart de terrain, bien décidés à enfermer les Verts et les pousser à la faute. Malgré le pressing de deux d'entre eux...
... le jeu à trois Camara - Maçon - Moukoudi fonctionne et ce dernier ose une passe à destination de Khazri, pourtant bien pris. L'avant-centre stéphanois, qui avait donc beaucoup décroché, garde le ballon malgré la pression, se retourne... et finit par le remettre à Maçon :
Sauf que la situation avait changé, les Lorientais s'étaient focalisés sur Khazri. Ainsi, Maçon peut combiner avec Moukoudi, qui ouvre enfin vers le côté opposé, où Kolo et Aouchiche étaient complètement libres : si 6 adversaires se trouvaient dans ce quart du terrain, il y avait de l'espace ailleurs.
Cet espace est pris par la remontée de Kolo, qui combine avec Youssouf et Aouchiche, ce dernier étant lancé balle au pied vers la défense. C'est toujours difficile de défendre en reculant, mais la défense de Lorient est aidé par les faibles appels stéphanois : seulement Abi et Bouanga s'y trouvent, et ils sont complètement excentrés, leurs courses ne créant pas des décalages.
La solution de passe pour Aouchiche vient de Khazri, qui avait remonté tout le terrain, reçoit le ballon bien dosé dans sa course et essaye de franchir en dribblant. Il est bousculé par un adversaire à l'entrée de la surface, mais l'arbitre ne siffle rien.
Cette action n'a rien donné, mais elle est un bon exemple du sang froid des Verts sous le pressing adverse et de cette volonté de sortir le ballon proprement de leur camp. Evidemment, c'est une approche qui peut leur jouer des mauvais tours, chaque petite erreur pouvant avoir des grosses conséquences. Comme à la 5e minute...
... quand Green joue avec Moukoudi, qui cherche Camara. Sauf que le jeu avait été bien lu par un milieu adverse, qui surgit et intercepte dans les pieds du capitaine stéphanois. Son tir s'écrase ensuite sur le poteau...
Jouer et camper dans la moitié adverse
Même si les Verts ont recherché à remonter le ballon proprement de leur propre moitié, ils ont préféré avoir la possession dans la moitié adverse. Moins d'espaces, plus de pertes de balle, mais aussi plus d'opportunités qui en découlent, grâce au contre-pressing. Qui est tout simplement le pressing effectué juste après avoir perdu le ballon, pour le récupérer et profiter du fait que l'adversaire est en déséquilibre (se projetant déjà dans une phase de transition). Et les protégés de Claude Puel ne sont pas avares d'effort sur cet aspect, comme par exemple à la 19e minute :
Une combinaison entre Aouchiche et Bouanga dans les 30 derniers mètres échoue et un défenseur adverse dégage de la tête, jusqu'à un coéquipier. Les Lorientais peuvent partir en contre...
... mais l'étau stéphanois se resserre immédiatement. Kolo, Zaydou, Camara et Khazri entourent le porteur du ballon, qui s'en débarrasse en le donnant à un coéquipier, qui n'a pas de solutions...
Un autre exemple, après la pause, part d'une belle combinaison à gauche entre Aouchiche, Bouanga et Kolo :
Du jeu à trois, qui continue avec Kolo qui recherche Bouanga dans l'axe, plusieurs adversaires ayant été attirés par l'appel d'Aouchiche. Malheureusement la passe est un peu à contre-temps et le ballon est intercepté :
Le milieu lorientais peine à contrôler le ballon, ce qui lui est fatal. Le temps de se retourner, ses coéquipiers sont tous pris par des Stéphanois déterminés à rester haut...
... et Bouanga et Khazri viennent sur lui. Le dernier arrive à récupérer le ballon dans les pieds du Lorientais et décale Hamouma...
... qui voit sa frappe contrée par un défenseur. Le ballon arrive sur l'aile droite, où Maçon sprinte pour le récupérer, prenant ensuite le temps d'ajuster son centre.
Il a des solutions, pas moins de six Stéphanois se trouvant dans la surface ou à l'entrée. Le ballon est à destination de Hamouma, qui rate le cadre. Quelques minutes plus tard, Lorient ouvrait le score...
Conclusions
Bien évidemment, on ne peut pas tirer des conclusions à partir d'un seul match - probablement les Verts afficheront d'autres visages tactiques tout au long de la saison, par choix ou pour s'adapter au style de jeu de l'adversaire. Ce n'est pas important, ce qui compte le plus est de maîtriser l'approche tactique choisie. Ça n'a pas toujours été le cas lors de ce match, qui a aussi été rendu difficile par une condition physique hétérogène, plusieurs joueurs ayant clairement du mal en fin de partie.
Les espaces entre les lignes ont mis en difficulté les milieux de l'ASSE quand il s'agissait de récupérer le ballon (surtout suite aux longs ballons dont Lorient a abusé), pendant que les pistons lorientais ont pu parfois profiter du manque de rigueur défensive des ailiers stéphanois. Et le peu de combinaisons entre les offensifs, rajouté au manque de réalisme dans la zone de vérité (3 tirs cadrés, dont 1 penalty, sur 20 !) ont gâché tous les efforts fournis dans le contre-pressing. Des aspects à améliorer pour les prochaines journées, même si ce n'était pas si mal pour un match de reprise...