vertigogo wrote:Tiens, ce thread étant revenu de nulle part, j'aimerais bien avoir l'avis de rising, et de toute personne intéressée, d'ailleurs, sur le débat suivant.
Le constat :
En France, la littérature générale (on pourrait faire le même constat pour la poésie) est un peu au fond du trou (je ne parle pas de la littérature commerciale qui, pour le coup, marche plutôt bien). Les grosses maisons, gangrénées par les copinages en tout genre et l'indigence intellectuelle, ont globalement des productions d'une médiocrité affligeante et les petites maison ont des audiences confidentielles et souvent pas mal de difficultés à seulement survivre (au même titre que les petits libraires, d'ailleurs).
Dans le même temps, on voit ici ou là se développer des initiatives visant à contourner le système des éditeurs traditionnels, en utilisant essentiellement les nouvelles possibilités offertes par internet (auto-édition, coopérative d'auteurs, anti-édition de Nabe, site communautaire auteurs-lecteurs, bases de données de textes numériques, etc...).
Le débat :
L'édition traditionnelle est-elle effectivement vouée à moyen terme à disparaître ou, au moins, à perdre sa place prépondérante dans le monde littéraire ? Quelles formes nouvelles de diffusion des textes littéraires sont amenées à s'imposer ?
J'avais pas lu la question.
La littérature française est en effet au fond du trou. La seule littérature qui présente régulièrement des perles est la littérature étrangère. Normal, puisque les étrangers sont plus nombreux que les Français. Cette histoire devient désagréable. Mais que fait Nicolas ?
Je ne pense vraiment pas que les grandes maisons d'éditions ont des productions affligeantes. Certaines oui, telles Albin Michel, Plon. Oui, sans aucun doute. Mais Gallimard et tous les éditeurs diffusés par Le Seuil (Bourgois, Phébus, Corti etc...) font un travail d'édition globalement remarquable.
Il ne suffit pas d'être un petit éditeur pour être intellectuellement supérieur aux autres. Souvent ces gens-là publient des âneries repoussantes avec l'appui honteux du Centre National du Livre, au nom de la pluralité, au gré d'une coucherie. Il n'y a pas que Ribéry qui couche avec le premier qui traîne. Il se produit d'ailleurs la même chose dans d'autres domaines, comme le théâtre, avec par exemple la Comédie de Saint-Etienne, qui présente souvent des spectacles nuls, subventionnés, avec des salles perplexes et proches de la viditude, mais avec la bénédiction de la bobocratie de gauche comme de droite, de l'extrême gauche comme de l'extrême onction.
Pour en revenir à notre problème, il existe néanmoins d'excellents petits éditeurs, tels Finitude à Bordeaux, que soit-dit en passant j'embrasse sur la bouche, amour girondin oblige, ou encore Le Temps qu'il fait à Cognac, Chandeigne, Desjonquères, Champs Vallon, La Fosse aux ours ( un Lyonnais... pouahhh, c'est dégueulasse).
Le problème ne se situe pas sur la taille de la maison d'édition, mais bien sur la prise de risque. Comme en librairie d'ailleurs. Qu'est-ce qu'une petite librairie ? ... comme j'ai lu dans l'énoncé de la question.
Dans ma bonne ville, ma librairie est considérée comme une petite librairie. En terme de chiffre d'affaire sans doute, puisque je fais 15 % du chiffre de la plus grande librairie généraliste de la ville. En terme de surface commerciale aussi. Mais pas en terme de choix, puisque dans les domaines que je présente : littérature et sciences humaines, j'ai 35 000 livres en stock pour 34 500 titres différents, alors que le confrère géant présente 40 000 livres pour 10 000 titres seulement. Cherchez l'erreur. Je ne présente pas Musso, alors que mon confrère a, en permanence, une centaine d'exemplaires du dernier titre de ce comique.
La différence, au yeux du public, ne réside pas dans le choix proposé bien supérieur pour l'un, mais dans l'espace, le linéaire des vitrines, la climatisation, les portes automatiques etc... de l'autre. On aime le modernisme à tout va à l'encontre de la contrainte et de la tradition. Mais je ne conteste pas cette pluralité. Il faut de tout pour tous les publics.
Je ne néglige absolument pas les nouveaux moyens d'éditions, de diffusions, de ventes. Après tout je réalise la quasi moitié de mon chiffre d'affaire en vendant des livres sur le net, avec une centaine d'envois par jour. Certes, c'est une nouvelle façon de travailler. Les commandes arrivent jour et nuit, dimanches et jours fériés. C'est contraignant, mais souvent passionnant, ou jouissif, lorsque j'envoie des bouquins à Harvard ou à Princeton, alors qu'il y a quelques années cela ne m'aurait même pas effleuré l'esprit de dépasser géographiquement La Ricamarie. Le livre électronique ne me fait pas franchement peur. Il y ' aura toujours les amateurs, les passionnés de "l'objet" livre, et les bobomaniaques du ipod, apod ou xpod à venir. L'être contre le paraître. Mais en terme de proportion, la planète est suffisamment peuplée pour laisser espérer aux éditeurs et librairies qui vivent leur métier dans une éthique la plus rigoureuse que possible de survivre, voire même de vivre décemment.
Et puis, dans le pire des cas, on pourra toujours se recycler vers le papier cul, en imprimant de la sorte les oeuvres complètes de Musso et autres trous d'air que l'on pourra lire par petites doses, un petit peu tous les jours. D'ailleurs Henry Miller n'a-t-il pas écrit que la meilleure manière de lire Don Quichotte était de la faire dans les toilettes. Il a mis ainsi six mois à torcher cet excellent livre. Le seul problème de ce type de livre en rouleau sera l'espace de stockage. Kerouac avait d'ailleurs goûté à ce genre de livre en écrivant à la machine sur des rouleaux sa littérature dite de l'instant ; même s'il faut reconnaître que ourré, shooté et je ne sais quoi encore, il arrivait à un niveau à des années lumières de celui des écrivaillons enfnaqués.
Donc en résumé, la taille, l'espace, la manière, le procédé ne font pas la qualité. Il y a partout des écrits de qualité, ouvrons simplement les yeux, et aidons ceux qui les défendent le mieux ./