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Emmanuel Rivière est un OVNI dans l'histoire de l'ASSE. Prometteur attaquant de la réserve, buteur confirmé dès ses premiers pas en pro, il aura laissé un bon souvenir en tant que joueur sans susciter néanmoins beaucoup de regrets au regard de son rocambolesque départ.
Mais avant de s'attarder sur son destin particulier, revenons-en au début...
Emmanuel voit le jour le 3 mars 1990 au Lamentin, en Martinique. Très vite mordu de foot, il fait ses débuts au club local de Saint-Luce avant de taper dans l’œil des recruteurs stéphanois lors de la Coupe de France des 14 ans qui se tient à Clairefontaine. Ceux-ci le recrutent à l'été 2005, malgré la concurrence du PSG et de l'OL.
Le jeune Rivière, à peine 15 ans, a déjà le sang vert: "L'ASSE est légendaire en Martinique. C'est un très grand club. Ma famille était contente de me voir signer ici. Mon père, qui suit beaucoup le football, m'en parlait souvent"
Un fois son intégration au centre de formation digérée, il devient pensionnaire de l'équipe réserve en septembre 2006, à seulement 16 ans et demi et se permet de marquer 7 buts en 22 matches dont le premier contre Saint-Priest (69).
La carrière de Rivière en un clin d'œil
Ses belles performances en match et à l'entraînement, où il rejoint régulièrement le groupe pro, le poussent naturellement à signer un contrat pro en 2008, en même temps que deux autres joueurs aux trajectoires diverses: Boubacar Mansaly et Pape Abdoulaye Coulibaly. Il obtient le n°29 et est promu en équipe 1.
Pour autant, Rivière ne joue pas beaucoup lors de cette saison et se contente le plus souvent du banc. On l'aperçoit quelques minutes lors du match de Coupe d'Europe contre Valence (2-2) mais il faut attendre le premier match de l'année 2009, à Bordeaux en Coupe de France, pour qu'il fasse ses grands débuts en pro où il est titularisé... arrière droit !
Mais bien qu'il souffre face à Jussié et Obertan, il permet à l'ASSE d'obtenir la qualification (1-0, but de Gomis) et justifie la confiance d'Alain Perrin. Un mois plus tard, il dispute enfin son premier match en Ligue 1 face à Lyon (1-1) et inscrit son premier but lors d'un importantissime match au Havre pour le maintien (victoire 4-2).
Rivière lors de ses débuts durant la saison 2008-09
Du coup, lorsque démarre la saison 2009-10, Manu prend encore du galon: Bafé Gomis quitte les Verts pour les vilains Lyonnais et libère un poste de buteur dont ni Ilan (blessé), ni Mirallas (en manque de forme) ne s'emparent. Il ne tarde pas à en profiter en inscrivant son premier but de la saison face à Toulouse (défaite 3-1) et continuer son irrésistible ascension: en 30 matches, il marque à 10 reprises des buts qui seront quasiment tous décisifs. Certaines de ses réalisations sont d'ailleurs extrêmement importantes: face à Montpellier, à Grenoble ou à Boulogne (où il assure même le maintien de l'ASSE). Chacune d'entre elles est d'ailleurs ponctué d'un joli salto arrière qui fait frémir d'angoisse son entraîneur: ce sera la signature de Rivière.
Un salto pour chaque but marqué
Nommé dans la catégorie du Meilleur espoir du Championnat (où il est battu par Eden Hazard), Emmanuel Rivière a tout pour s'imposer comme le principal dynamiteur des défenses qu'attend l'ASSE depuis le départ de Gomis. Pourtant, alors que tout le prédispose à casser la baraque, la saison 2010-11 sera celle de la stagnation: Manu inscrit à nouveau 8 buts en 35 matches (dont un doublé à Montpellier) mais peine à se montrer décisif. Dans un collectif qui redevient intéressant après plusieurs années galère, Rivière ne surnage plus et semble montrer quelques limites.
Paradoxalement, il fait forte impression en équipe de France Espoirs où ses 6 buts en 15 matches poussent Erik Mombaerts à le sélectionner régulièrement.
Incident à caractère raciste lors de France-Malte espoirs en 2010
Pourtant, quelque chose semble cassé. Le joueur montre des envies d'ailleurs alors que Christophe Galtier lui témoigne toute sa confiance, il est courtisé par le Toulouse FC et s'entraine en dilettante. Il déclare lors de l'intersaison 2011: "Je veux aller à Toulouse. Ce club me fait des appels du pied depuis dix-huit mois et je n'y suis vraiment pas insensible. J'ai fait part de cette envie à mon entraîneur et au président du directoire. Le coach m'a dit qu'il voulait que je reste mais qu'il ne mettrait pas son veto à mon départ. J'espère maintenant que mon départ pourra rapporter une belle somme à mon club formateur, où j'ai passé de très belles années. Le TFC est un club idéal pour moi. Je veux encore progresser en France"
Lors d'un stage d'avant-saison, au Chambon-sur-Lignon, Rivière quitte le groupe contre la volonté de son coach et se retrouve immédiatement mis à pied. Son bras de fer le conduit à être rapidement transféré au TFC pour une somme entre 6 et 8 millions d'euros.
Buteur attitré des Verts, Rivière préfère filer à Toulouse à l'été 2011
Cette surprenante décision a pour conséquence de le voir se mettre à dos une partie du public vert qui n'oubliera pas de le siffler copieusement lors de son retour à GG le 21 septembre 2011 (1-1).
Sous le maillot du TFC, Rivière inscrit 5 buts lors de sa première saison puis 5 autres lors de sa seconde, loin de justifier le prix assez onéreux de son transfert.
Rapidement, les supporters toulousains ne le voient plus comme un pilier et ne pleurent pas son départ lors du mercato d'hiver de janvier 2013. Choix étonnant: Manu choisit d'aller dans un club de L2 ! Mais pas n'importe quel club... Il choisit celui qui est presque assuré de vite remonter au vu de sa puissance sportive et financière: l'AS Monaco, nouveau jouet du milliardaire Rybolovlev.
Un intermède toulousain de deux ans peu concluant pour Rivière
Sur le Rocher, on prédit un funeste destin à Rivière. Celui d'un bouche-trou d'abord puis d'un cireur de banc dès le club remonté en Ligue 1. Lui ne prête pas l'oreille à ces oiseaux de mauvaise augure et ouvre son compteur dès son premier match. Il inscrit 4 buts en 14 matches et décroche le premier titre de sa carrière, celui de champion de Ligue 2.
A l'été 2013, le club de la Principauté casse sa tirelire et engage la star mondiale Radamel Falcao. Rivière sait qu'il jouera un temps avec lui sur le front de l'attaque mais que d'autres étoiles viendront vite l'eclipser. Alors il saisit sa chance.
Avec un ratio d'un but par match en début de championnat, Manu gagne sa place de titulaire et ne quitte plus les compos de départ de Claudio Ranieri. Lorsque le Colombien se blesse aux croisés en Coupe de France, c'est même lui qui devient la principale pointe offensive de son club, aux dépens du nouvel arrivé, le Bulgare Dimitar Berbatov.
Malgré la concurrence de Falcao, Rivière revit sur le Rocher
Auteur de 13 buts sur sa deuxième saison, Rivière choisit alors... de quitter son club. Il faut dire que les Anglais de Newcastle United lui font les yeux doux depuis longtemps et que le championnat d'outre-manche le séduit de longue date. Sa bonne saison plaide pour lui et l'AS Monaco, bientôt délesté de Falcao et James Rodriguez, laisse ainsi partir son principal buteur pour l'Angleterre.
Rivière découvre la PremierLeague et ses gros clients,
comme ici le Mancunien Yaya Touré
Mais comme tant de Français exilés chez les Magpies, Rivière ne s'impose pas réellement à Newcastle. Le championnat anglais est rapide, technique et plus âpre que la Ligue 1 et Manu le réalise an n'inscrivant que 3 buts en 28 matches lors de sa première saison. Blessé lors de la seconde, il ne réapparaît qu'à la fin de l'hiver dans les compos de Steve McClaren et ce, pour 3 rencontres seulement (0 but).
Délaissé par le club du Tyneside, Manu tente de retrouver le sourire et le soleil à Pampelune, dans la douce moiteur de l'été navarrais. L'Osasuna, fraîchement promu, a besoin d'un buteur d'expérience. Malheureusement, muet lors des 17 rencontres qu'il dispute dans le championnat espagnol, Rivière ne peut empêcher son club de sombrer et d'être relégué en Liga Adelante.
Totalement au point mort, sa carrière se relance brusquement à l'intersaison 2016 lorsqu'il est sollicité, à l'instar de Nolan Roux et Renaud Cohade, par le FC Metz ! Emmanuel retrouve la France et la confiance, il joue (48 matches) et marque (9 buts), prenant même un malin plaisir à ouvrir le score sur penalty face à son club formateur lors d'une déroute mémorable à Saint-Symphorien (3-0 le 17/01/2018).
Le nouveau Rivière est arrivé du côté de la Lorraine
Puis après deux saisons honorables en Ligue 1 puis en Ligue 2, Rivière franchit les Alpes tel un torrent qui arpente les chemins d'une carrière tortueuse. En fin de contrat chez un FC Metz qui retrouve l'élite avec fracas, Emmanuel se sent de poursuivre l'aventure en D2 mais italienne: le Cosenza Calcio lui ouvre les portes et c'est un miracolo: il affole les défenses, dispute 31 matches et claque 13 buts, comme à la belle époque de Monaco. De quoi attirer l'attention de clubs de Série A comme le promu Crotone qui le recrute à l'été 2020 avant non seulement de rechuter à l'étage inférieur (un classique pour Rivière) mais également de le licencier pour faute grave à l'automne 2021, pour avoir volontairement séché les entraînements en raison d'un conflit l'opposant à sa direction...
Sans club au soir de ses 32 ans, il met un terme à sa carrière sans annonce ni communiqué, bien plus directements que ses adieux au football stéphanois dix ans plus tôt.
Dolce vita d'un Rivière en Calabre
Si Rivière a su saisir sa chance à Monaco puis à Metz pour obtenir le graal des grands championnats étrangers, ce qui n'était pas une mince affaire pour un joueur de son statut, il aura néanmoins laissé à Saint-Étienne une image ambivalente: un joli symbole de la formation stéphanoise tout comme un sacré miroir du monde carnassier du football moderne. Son ambition exagérée l'ayant conduit à signer dans un club moins huppé pour un montant néanmoins important, il aura donc finalement suscité peu de regrets aux supporters de l'ASSE, ce que la suite de cahotique carrière aura d'ailleurs pu confirmer...