Avant le match qui opposera ce dimanche les Verts au premier club qui l'a accueulli en prêt, l'ex-capitaine des U19 stéphanois et actuel attaquant strasbourgeois Idriss Saadi nous a livré ses impressions.
Comment vas-tu Idriss ?
J'ai eu une petite fissure au tendon rotulien. J'avais une calcification qui s'était mise dans le tendon, il fallait l'enlever. J'ai été opéré en octobre. Mais une nouvelle calcification postopératoire me gênait, du coup je me suis refait opérer le 25 février. Je suis encore en rééducation à Saint-Raphaël, j'ai encore deux semaines et demie à tenir. Je ne pense pas qu'on me reverra cette saison. Je prends mon mal en patience comme je l'avais fait quand je m'étais fait les croisés à Clermont. C'est frustrant d'être tenu éloigné longtemps des terrains mais ça fait partie des aléas d'une carrière. Cela forge le caractère, il faut apprendre de ces expériences-là.
Tu n'auras joué qu'une dizaine de minutes cette saison, au Vélodrome le 26 septembre dernier. Comme vis-tu cette saison quasiment blanche et sèche pour toi mais superbe pour ton club, qui a remporté la Coupe de la Ligue ?
On fait effectivement une très belle saison. Cette victoire en Coupe de la la Ligue m'a fait du bien dans la tête. On était tout le groupe ensemble, on a partagé certaines émotions. Bien sûr j'aurais aimé être rétabli et jouer. Maintenant, quand on est blessé longtemps, c'est clair et net que c'est compliqué à vivre. A une certaine période je ne pouvais plus aller au stade. Sentir le vestiaire, l'herbe, ça me faisait plus de mal que de regarder ça à la télé. Du coup je préférais rester devant ma télé.
Ce dimanche ton club formateur va jouer contre le Stade de Reims. Un club que tu connais bien pour avoir porté le maillot rouge et blanc pendant cinq mois. Quels souvenirs gardes-tu de ton expérience là-bas ?
J'en garde des souvenirs mitigés. Le Stade de Reims a pas mal évolué depuis mon court passage, j'ai joué là-bas il y sept ans maintenant. C'était mon premier prêt, je n'étais pas forcément prêt à partir. J'avais déjà fait quelques apparitions en Ligue 1 avec les Verts mais je ne connaissais pas vraiment le monde pro. Quand je suis parti à Reims, je n'avais pas encore vingt ans. Sur le moment, je n'ai pas forcément bien vécu ce départ. Ce prêt n'a pas été catastrophique mais on ne peut pas dire que non plus ça se soit super bien passé : j'ai joué une dizaine de matches mais seulement deux en tant que titulaire et je n'ai marqué qu'un but. Les prêts que j'ai connus plus tard au Gazelec et à Clermont ont été beaucoup plus fructueux. A l''époque où je jouais à Reims, les infrastructures n'étaient pas celles de maintenant. On s'entraînait sur un terrain de piètre qualité. Il y avait des préfabriqués. Tout a changé depuis, ce n'est pas comparable. Rétrospectivement, je me dis que ce prêt à Reims m'a énormément fait progresser dans l'aspect mental. Au plus tôt on vit ces situations, plus on est paré je pense...
Tu as aimé l'ambiance en Champagne ?
Il faut avouer qu'elle était plutôt pas mal. Le club était dans une bonne dynamique, il a d'ailleurs fini la saison deuxième donc promu en Ligue 1. Cet élan positif cachait un peu tout. Il y avait de l'ambiance à Delaune mais honnêtement, c'était sans commune mesure avec ce que j'ai connu à Sainté et surtout avec ce que j'ai découvert à Strasbourg. Sainté c'est déjà du très haut niveau en termes d'ambiance, c'est clairement au-dessus de Marseille pour moi. Mais je considère que Strasbourg c'est encore un cran au-dessus. C'est démesuré, c'est ouf ! Cela n'enlève rien à la grande estime que j'ai pour le public stéphanois, qui reste à mes yeux dans les deux ou trois premiers de France.
Vois-tu les Verts accrocher le podium en fin de saison ?
Je suis avec attention la lutte pour les places européennes, ce serait marrant que Sainté finisse devant Lyon ! Cette lutte s'annonce indécise. Cette équipe de Saint-Etienne a pris l'habitude de montrer des choses souvent très bonnes, notamment contre les petites. Mais parfois elle peut décevoir contre les gros ou au moment de franchir un cap. C'est pour ça que je reste prudent. Le fait que le départ en fin de saison de Bruno Genesio ait été annoncé peut avoir un impact négatif sur les Lyonnais et à l'inverse peut produire un impact positif pour des Verts qui ont une vraie opportunité de finir devant le rival. Ce serait extraordinaire que Saint-Etienne finisse troisième, ça fait plus de 35 ans que le club attend ça ! Par rapport aux autres années, "c'est le moment où jamais" ! Lille est sur un nuage et finira deuxième mais Lyon, ce n'est pas ce qu'on a connu. Il faut que les Verts essayent d'en profiter.
En tant qu'ancien joueur de l'ASSE, tu seras à fond derrière les Verts dans ce mano a mano avec les vilains ?
Honnêtement, je vais suivre ça avec beaucoup d'intérêt mais depuis que je suis parti, je suis les Verts à distance. J'ai surtout gardé les souvenirs de l'époque où j'étais au centre de formation. Je ne me revendique pas pour autant supporter acharné des Stéphanois. Je ne suis pas né Saint-Etienne. J'ai eu la culture parce que je suis venu tôt chez les Verts et qu'on me l'a inculqué. On est investi par rapport au derby. Je suis fier d'avoir défendu ce maillot vert. Mais je ne suis pas à me dire constamment "punaise, il faut absolument que les Verts terminent devant !" J'aime bien cette rivalité avec les Lyonnais, je trouve ça marrant, mais je ne vis pas dans l'obsession qu'on finisse à tout prix devant Lyon.
Comment vois-tu ce match des Verts à Reims ?
Ce ne sera pas évident pour les Verts car Reims fait une très belle saison, surtout pour un promu. Nîmes aussi d'ailleurs ! David Guion fait du très bon boulot à Reims. Je l'ai eu brièvement comme entraîneur à l'ASSE des U16 nationaux, quand j'avais 14 ans, il m'avait fait surclasser pour jouer les deux derniers matches avec lui. Cela s'était super bien passé, j'étais censé l'avoir la saison d'après mais le club avait renouvelé un peu tous les entraîneurs à l'époque. Ce match à Delaune sera un bon test pour les Stéphanois, ça va montrer s'ils sont capables de supporter cette pression d'aller chercher pourquoi pas la Ligue des Champions. En s'imposant à Reims, les Verts mettraient un coup à Lyon. Si les Lyonnais se manquent, ils sont foutus ! Ce match à l'extérieur contre une belle équipe va être un bon révélateur pour Sainté. Si on veut faire du mal à l'adversaire, en étant à trois points d'eux, c'est à ce moment-là qu'il faut taper ! Aux Verts de montrer qu'ils ont le coffre et la tête pour aller chercher cette troisième place.
Huit ans après toi, les U19 stéphanois joueront dans dix jours au Stade de France une finale de Coupe Gambardella. Quels souvenirs gardes-tu de cette compétition ?
J'en garde des souvenirs extraordinaires, ça a été les premières sensations du haut niveau. Quand on joue une finale au Stade de France, on a un aperçu de ce que l'on peut vivre plus tard en professionnel. Je pense qu'il faut qu'ils profitent de cette expérience. Quand une carrière passe, on ne se souvient que des moments forts. Quand t'es jeune, la Gambardella, c'est LA grosse compétition. C'est un moment où on est concentré et où il faut se dire "c'est le moment ou jamais". Bien sûr quand on est compétiteur on rêve de tous de soulever la coupe. On n'a pas connu ce bonheur-là mais je considère que même dans la défaite, on en tire des leçons. Ça reste une expérience enrichissante. Nous on a perdu cette finale aux tirs au but mais ça m'a fait apprendre à titre personnel. Le dénouement a été cruel mais c'est ce qui fait la beauté du football. Sur le moment tu accuses le coup. J'étais capitaine, je finis meilleur buteur de la compétition mais je rate ce tir au but. Je rêvais de soulever le trophée, pour l'équipe, pour le club, pour moi... Cela faisait douze ans qu'on n'était pas allé en finale. On est passé tout près de soulever le trophée. Sur le coup ça fait vraiment mal mais avec le temps la déception s'estompe, l'histoire est quand même belle. Jouer une finale de Gambardella, ce n'est pas rien. Quand tu regardes la génération contre qui on perd, la plupart des mecs ont fait une belle carrière : Kurzawa, Eysseric, Mendy, Appiah...
Aurais-tu des conseils à donner aux protégés de Razik Nedder ?
Oui, j'ai un conseil à leur donner. Nous on a fait l'erreur d'avoir été impressionné par le Stade de France. On n'a pas joué comme on avait déjà joué les autres matches lorsqu'on avait battu toutes les autres équipes. Si j'ai un conseil à donner aux jeunes joueurs stéphanois, c'est de jouer comme s'ils jouaient à L'Etrat, comme s'ils étaient au stade Aimé Jacquet. Il n'y a que ça qui fera qu'ils joueront leur football, ça leur donnera de grandes chances de gagner le match. J'espère évidemment qu'ils vont y arriver, je serai bien sûr derrière eux contre Toulouse en finale. Autant je n'ai pas de souvenirs marquants sous le maillot vert avec les pros, dans le sens où on m'a fait comprendre que la porte était ouverte pour que je parte, autant j'ai vécu de très belles années au centre de formation de l'ASSE avec de très bons formateurs. Je serai à fond derrière les jeunes Verts le 27 avril. Ils ont eu une très belle génération, ils ne sont pas arrivés en finale par hasard. A eux de ne pas oublier qu'ils ont fait ce superbe parcours ensemble et de ne pas croire qu'ils vont le terminer tout seul. Ils y arriveront ensemble.
Merci à Idriss pour sa disponibilité et prompt rétablissement !