Episode 3 : 13 mai 1962, triomphalement sombrer !


En Coupe de France, comme en championnat, elle est riche notre histoire. Elle est belle, elle est grande, elle est mouvementée. Pour meubler la longue et incertaine attente qui nous sépare de notre 11ème finale de Coupe de France, P² vous propose de revenir sur les 10 qui l’ont précédée :
1941, 1960, 1962, 1968, 1970, 1974, 1975, 1977, 1981, 1982.
Dix finales dont les dates, si on y regarde de près, disent tout de notre domination sur le football français pendant deux décennies.
En 23 éditions, entre 1960 et 1982, les Verts sont en effet montés 9 fois à Paris. Sur cette même période ils devancent … les Vilains (6 finales), et Monaco et Nantes (4 finales chacun).

13 mai 1962, triomphalement sombrer !


C’est une équipe de moribonds qui se rend à Colombes en ce mois de mai 1962. Une équipe qui s’est tristement vautrée en championnat, et dont la descente est déjà acquise, même si une journée reste à disputer. Une équipe pourtant brillante sur le papier et riche de nombreux internationaux. Une équipe présidée depuis un an par un homme à pipe et bientôt à titres. Une équipe dont François Wicart est redevenu l’entraîneur depuis moins de deux mois après une humiliante défaite chez les Vilains (0-4) qui a causé la perte de son prédécesseur, Henri Guérin.

Ce triste contexte explique l’absence d’engouement autour de la finale. Les supporters stéphanois montent seulement à 2 000 à Colombes alors que ce sont 7 000 supporters lorrains qui sont venus soutenir le FC Nancy, 4ème en championnat. Secrétaire général du club, Charles Paret-guère surpris et résume l’ambiance d’un imagé : « Nous sommes dans la situation délicate d'un père de famille qui marie sa fille et qui vient de perdre sa femme ».
Avec Wicart redevenu coach, c’est un fidèle des Verts qui dirige l’équipe. Fidèle comme joueur bien entendu avec huit saisons en tant que latéral entre 1952 et 1960. Et comme entraîneur déjà la saison précédente, avec une belle 5ème place en 1961 en championnat, après avoir remplacé Vernier, l’homme de la première finale, viré en novembre 1960.
Pour leur deuxième visite à Colombes, ce sont sept des onze de la finale de 1960 qui sont alignés. Sept dont Liron, toujours présent sur le pré mais remplacé par Jean-Claude Baulu dans le rôle de serial buteur. Baulu, dont les statistiques monnetpaquettiennes en championnat (9 pions en 3 saisons) ne pouvaient laisser imaginer le rôle décisif qu’il joua dans cette première conquête. Auteur de sept buts durant cette campagne de coupe, il claque ce jour-là le plus important : c’est grâce à lui que les Verts vont remporter leur première Coupe de France, à la 86ème . Echappé côté gauche, il vient remporter à l’angle des six mètres son duel avec le gardien nancéen.
Rétrospectivement comment pouvait-il en être autrement si on se souvient que Brigitte Bardot avait envoyé avant le match un télégramme d’encouragement et que De Gaulle avait quant à lui confié à la mi-temps au maire de Sainté (De Fraissinette) souhaiter une victoire des Verts.
Encouragés par des monuments, ces Verts boudés par leurs supporters au moment de partir à Paris, retrouvent une cité en liesse : ils sont 30 000 à les accueillir à leur arrivée à Châteaucreux le lendemain de la finale.


Auparavant…

Auparavant, et comme le voulait la tradition à l’époque, les Verts voient du pays. Ils ont ainsi disposé du Mans 3-1 en 32ème à Tours (un but de Baulu), de Toulouse 1-0 (but de Baulu déjà) en 16ème à Marseille devant plus de 12 000 spectateurs, de Lens 3-0 (un but de Baulu) en 8ème au Parc des Princes devant 19 000 personnes, de Béziers 3-0 en quart (triplé de Baulu) à Marseille devant 16 000 personnes, et d’Angers (1-0) en demi-finale au Parc des Princes devant 17 000 personnes.
Le parcours atteste qu'à cette époque les matchs sur terrain neutre faisaient recette, même en début de compétition.
Auteur de 7 buts (sur 12), Jean Claude Baulu est l’artisan n°1 de cette première coupe, lui qui pourtant n’a jamais vraiment brillé en championnat durant ses trois saisons en Vert.

Une semaine après cette première coupe, les Verts se rendent à Montpellier pour une 18ème défaite en championnat, défaite 3-4 qui entérine leur 17ème place. Celle du premier relégable, à 3pts .... des Vilains, 16èmes. En cette saison des premières (première coupe, première relégation du club depuis son arrivée dans l'Elite en 1938), il la fallait cette coupe pour oublier un peu cette annus horribilis.

Tourneboulés par l’impression unique de vivre sacre et naufrage simultanément, les supporters ne le savent pas encore, mais ils ne sont pas au bout de leurs émotions. La suite marquera en effet tout autant les esprits : un an plus tard les Verts finissent devant Nantes en tête d’un championnat de division 2 à 19. Leur premier titre de division 2. Dans la foulée, les promus remporteront au printemps 1964 leur deuxième titre de champion de France de division 1, devant Monaco, bouclant ainsi avec cet exploit une drôle de trilogie : coupe de France 62, champion de France de D2 63, champion de France de D1 64. Une délicieuse habitude s’installe : de 1962 à 1970, si on excepte les saisons 65 et 66, chaque printemps est l’occasion de fêter un titre vert.
Ils ignoraient leur chance, tous ces supporters massés place de l’hôtel de ville pour célébrer les joueurs au balcon. Comment pouvaient-ils imaginer qu’en ce jour de mai 1962 Sainté s'installait au sommet du foot français pour deux décennies ? Heureux supporters à qui les vingt années qui s’ouvrent en ce soir de mai 1962 vont offrir 9 titres de champions et 6 coupes de France.