Page 35 of 50

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 27 Oct 2015, 17:12
by rouge
Naar wrote:
Lefab42 wrote:Mon prochain livre de chevet, écrit par Cédric Biagini, pour amener de l'eau au moulin du débat actuel :

Image

Il vient juste de sortir chez l'excellente maison d'édition l'échappée avec la présentation ci-dessous :

"Cerné de toute part, le livre est sommé de rentrer dans l’ordre numérique. Laboratoires du futur plus innovants que jamais, multinationales du Web, géants de l’électronique, pouvoirs publics et techno-enthousiastes œuvrent de concert pour faire disparaître ce petit « cube de papier » qui fait figure de fossile à l’heure où la culture numérique s’impose partout. Bien que sa liquidation ne se fasse pas aussi vite que prévu – le marché de l’e-book peinant à s’imposer en France –, les acteurs de la chaine du livre sont de plus en plus fragilisés, même si certains croient pouvoir transférer leur métier dans un monde qui n’a pourtant pas besoin d’eux. Et ce, alors que les modes de lecture induits par le livre, au fondement de nos façons de penser et de nos manières d’être au monde, sont aujourd’hui en crise. Le livre, dans sa linéarité et sa finitude, dans sa matérialité et sa présence, constitue un espace silencieux qui met en échec le culte de la vitesse, permet de maintenir une cohérence au milieu du chaos. Point d’ancrage, objet d’inscription pour une pensée critique et articulée, hors des réseaux et des flux incessants d’informations et de sollicitations, il est peut-être l’un des derniers lieux de résistance.
C’est ce que nous rappellent les libraires, bibliothécaires, éditeurs, auteurs, traducteurs et lecteurs, venus d’horizons divers, qui s’expriment dans cet ouvrage. Un peuple du livre, réfractaire aux illusions numériques, qui défend ce pour quoi il se bat au quotidien, à contre-courant des processus qui endommagent nos capacités de lecture, de contemplation, de réflexion, d’écoute et d’abandon esthétique, pourtant si nécessaires à la construction de soi et au bien-être collectif."

Source : http://www.lechappee.org/l-assassinat-des-livres

Cédric Biagini, à la fois auteur et éditeur du livre nous a déjà gratifié de l'indispensable "l'emprise du numérique".
Peur panique face à la perte potentielle de son emploi, plus que la défense d'une certaine idée du livre. C'est ce que m'inspire ce passage que tu extrais. Ces pleurnicheries permanentes sur des produits culturels ont déjà abouti, 35 ans en arrière, à la catastrophique Loi Lang en 1981 ou à l'ubuesque arrêté Fabius, un an plus tard.
Il existe encore des libraires et plus de disquaire
Le fruit du hasard sûrement

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 27 Oct 2015, 17:27
by Danish
Sauf que pour l'instant, le visuel dématérialisé reste perfectible, à l'inverse de l'audio dématérialisé.

Pour moi aussi, ca ressemble à de la pleurnicherie. Si le livre doit disparaitre, ce dont je doute fortement, et bien ainsi soit-il !
Il aura toujours des adeptes de toutes façons. A part cà, il sera mort de sa belle mort et le pleurer n'aura aucun sens.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 27 Oct 2015, 17:29
by Naar
rouge wrote:
Naar wrote:
Lefab42 wrote:Mon prochain livre de chevet, écrit par Cédric Biagini, pour amener de l'eau au moulin du débat actuel :

Image

Il vient juste de sortir chez l'excellente maison d'édition l'échappée avec la présentation ci-dessous :

"Cerné de toute part, le livre est sommé de rentrer dans l’ordre numérique. Laboratoires du futur plus innovants que jamais, multinationales du Web, géants de l’électronique, pouvoirs publics et techno-enthousiastes œuvrent de concert pour faire disparaître ce petit « cube de papier » qui fait figure de fossile à l’heure où la culture numérique s’impose partout. Bien que sa liquidation ne se fasse pas aussi vite que prévu – le marché de l’e-book peinant à s’imposer en France –, les acteurs de la chaine du livre sont de plus en plus fragilisés, même si certains croient pouvoir transférer leur métier dans un monde qui n’a pourtant pas besoin d’eux. Et ce, alors que les modes de lecture induits par le livre, au fondement de nos façons de penser et de nos manières d’être au monde, sont aujourd’hui en crise. Le livre, dans sa linéarité et sa finitude, dans sa matérialité et sa présence, constitue un espace silencieux qui met en échec le culte de la vitesse, permet de maintenir une cohérence au milieu du chaos. Point d’ancrage, objet d’inscription pour une pensée critique et articulée, hors des réseaux et des flux incessants d’informations et de sollicitations, il est peut-être l’un des derniers lieux de résistance.
C’est ce que nous rappellent les libraires, bibliothécaires, éditeurs, auteurs, traducteurs et lecteurs, venus d’horizons divers, qui s’expriment dans cet ouvrage. Un peuple du livre, réfractaire aux illusions numériques, qui défend ce pour quoi il se bat au quotidien, à contre-courant des processus qui endommagent nos capacités de lecture, de contemplation, de réflexion, d’écoute et d’abandon esthétique, pourtant si nécessaires à la construction de soi et au bien-être collectif."

Source : http://www.lechappee.org/l-assassinat-des-livres

Cédric Biagini, à la fois auteur et éditeur du livre nous a déjà gratifié de l'indispensable "l'emprise du numérique".
Peur panique face à la perte potentielle de son emploi, plus que la défense d'une certaine idée du livre. C'est ce que m'inspire ce passage que tu extrais. Ces pleurnicheries permanentes sur des produits culturels ont déjà abouti, 35 ans en arrière, à la catastrophique Loi Lang en 1981 ou à l'ubuesque arrêté Fabius, un an plus tard.
Il existe encore des libraires et plus de disquaire
Le fruit du hasard sûrement
Et encore des salles de cinéma.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 27 Oct 2015, 18:02
by Marat Izmailov
Peur panique face à la perte potentielle de son emploi, plus que la défense d'une certaine idée du livre.
C'est tout à fait cela, l'expression d'un corporatisme. Le texte de présentation de l'ouvrage est ridicule (drôle de voir un texte si réactionnaire mis en exergue pour un livre édité par une maison gauchiste, d'ailleurs). Personne ne désire la disparition du livre, et celui-ci a encore de beaux jours devant lui. Même s'il est possible que la masse de la production soit engloutie par le numérique (ce qui ne serait pas un mal d'ailleurs), les belles éditions survivront grâce à une poignée de fin lecteurs et de bibliophiles. La Pléaide enterrera sans doute XO grâce au numérique et personne ne s'en plaindra !

Là où je rejoins en revanche les inquiétudes des détracteurs du tout-numérique, c'est sur la question scolaire. Les plans gouvernementaux se succèdent pour équiper les écoles en tablettes, ordinateurs et tableaux interactifs. D'une part au niveau pédagogique cela ne sert souvent à rien, et d'autre part l'école devrait rester un sanctuaire où l'on "déconnecte" les élèves qui sont déjà assaillis de gadgets numériques à la maison. Aujourd'hui, une famille modeste française a souvent trois "smartphones", une tablette, une TV connectée, un ou deux ordinateurs portables mais aucun livre ; dans ce contexte-là la présence du livre à l'école me semble indispensable.

Pour rester dans le sujet et mieux connaître la - relativement récente - histoire du livre, je vous conseille les cours de Roger Chartier.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 27 Oct 2015, 23:02
by Naar
Marat Izmailov wrote: La Pléaide enterrera sans doute XO grâce au numérique et personne ne s'en plaindra !
Pour sûr ! Sauf les nègres de Max Gallo.
Marat Izmailov wrote: Là où je rejoins en revanche les inquiétudes des détracteurs du tout-numérique, c'est sur la question scolaire. Les plans gouvernementaux se succèdent pour équiper les écoles en tablettes, ordinateurs et tableaux interactifs. D'une part au niveau pédagogique cela ne sert souvent à rien, et d'autre part l'école devrait rester un sanctuaire où l'on "déconnecte" les élèves qui sont déjà assaillis de gadgets numériques à la maison. Aujourd'hui, une famille modeste française a souvent trois "smartphones", une tablette, une TV connectée, un ou deux ordinateurs portables mais aucun livre ; dans ce contexte-là la présence du livre à l'école me semble indispensable.

Pour rester dans le sujet et mieux connaître la - relativement récente - histoire du livre, je vous conseille les cours de Roger Chartier.
Pour aller dans ton sens, il se dit beaucoup que les dirigeants des Gafa interdisent à leurs enfants tout équipement numérique au profit du livre-papier.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 07:23
by Marat Izmailov
Oui, c'est l'argument fétiche de Finkielkraut dans sa croisade contre le numérique à l'école ; je n'ai pas vérifié s'il était vrai.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 11:16
by minetvert
Marat Izmailov wrote:Oui, c'est l'argument fétiche de Finkielkraut dans sa croisade contre le numérique à l'école ; je n'ai pas vérifié s'il était vrai.
Very interesting mais un peu de mal à vous suivre, c'est quoi son super argument à finkiel machin?

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 11:41
by Marat Izmailov
minetvert wrote:
Marat Izmailov wrote:Oui, c'est l'argument fétiche de Finkielkraut dans sa croisade contre le numérique à l'école ; je n'ai pas vérifié s'il était vrai.
Very interesting mais un peu de mal à vous suivre, c'est quoi son super argument à finkiel machin?
L'argument est le suivant : les dirigeants des grandes entreprises américaines de l'internet (Google, Facebook, Amazon, Apple & Cie) privilégient pour leurs propres enfants des écoles déconnectées.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 15:10
by Marat Izmailov
Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 15:19
by Naar
Marat Izmailov wrote:Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).
Bébert doit y occuper une place importante, non ?

Edit : ah oui ^^. Excellente surprise que ce Philitt découvert récemment.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 28 Oct 2015, 20:50
by Marat Izmailov
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).
Bébert doit y occuper une place importante, non ?

Edit : ah oui ^^. Excellente surprise que ce Philitt découvert récemment.
Oui et non. De bonnes références, des entretiens dignes d'intérêt (un de Glaudes, d'ailleurs, dont nous parlions ici même), mais tout est cousu de fil blanc : s'adressant à de jeunes petits réactionnaires férus de littérature (et sans doute fait par les mêmes), on sait parfaitement pourquoi on lit le site et ce qu'on va y trouver. Convenu, attendu, sans surprise, sans génie et sans grand intérêt, au fond.

Sinon, Olaf nous avait caché la sortie de son dernier livre. Pourtant il s'affiche sans vergogne dans les lieux les plus malfamés pour le présenter.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 29 Oct 2015, 00:44
by Fourina
Sa posture d'écolo anti-voiture est donc un leurre... :mrgreen:

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 29 Oct 2015, 10:38
by Naar
Marat Izmailov wrote:
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).
Bébert doit y occuper une place importante, non ?

Edit : ah oui ^^. Excellente surprise que ce Philitt découvert récemment.
Oui et non. De bonnes références, des entretiens dignes d'intérêt (un de Glaudes, d'ailleurs, dont nous parlions ici même), mais tout est cousu de fil blanc : s'adressant à de jeunes petits réactionnaires férus de littérature (et sans doute fait par les mêmes), on sait parfaitement pourquoi on lit le site et ce qu'on va y trouver. Convenu, attendu, sans surprise, sans génie et sans grand intérêt, au fond.
Tes réserves sont fondées. Mais je te trouve très sévère avec un site qui propose, en amateur, des interviews de qualité avec des intervenants de haut-niveau. Ils rendent même Moix assez intéressant. Pour les articles, c'est autre chose, j'en conviens volontiers.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 29 Oct 2015, 11:22
by Marat Izmailov
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).
Bébert doit y occuper une place importante, non ?

Edit : ah oui ^^. Excellente surprise que ce Philitt découvert récemment.
Oui et non. De bonnes références, des entretiens dignes d'intérêt (un de Glaudes, d'ailleurs, dont nous parlions ici même), mais tout est cousu de fil blanc : s'adressant à de jeunes petits réactionnaires férus de littérature (et sans doute fait par les mêmes), on sait parfaitement pourquoi on lit le site et ce qu'on va y trouver. Convenu, attendu, sans surprise, sans génie et sans grand intérêt, au fond.
Tes réserves sont fondées. Mais je te trouve très sévère avec un site qui propose, en amateur, des interviews de qualité avec des intervenants de haut-niveau. Ils rendent même Moix assez intéressant. Pour les articles, c'est autre chose, j'en conviens volontiers.
Oui, tu as raison. À la relecture, j'ai été trop sévère : je retire le "sans grand intérêt" (seule la rubrique "actualités" est dénuée d'intérêt). Merci de m'inciter à la modération !

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 29 Oct 2015, 12:02
by Naar
Marat Izmailov wrote:
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:
Naar wrote:
Marat Izmailov wrote:Rien à voir avec ce qui précède : un entretien délicieux avec l'écrivain Frédéric Vitoux sur les rapports entre les écrivains et la figure du chat (et même leur chat en particulier).
Bébert doit y occuper une place importante, non ?

Edit : ah oui ^^. Excellente surprise que ce Philitt découvert récemment.
Oui et non. De bonnes références, des entretiens dignes d'intérêt (un de Glaudes, d'ailleurs, dont nous parlions ici même), mais tout est cousu de fil blanc : s'adressant à de jeunes petits réactionnaires férus de littérature (et sans doute fait par les mêmes), on sait parfaitement pourquoi on lit le site et ce qu'on va y trouver. Convenu, attendu, sans surprise, sans génie et sans grand intérêt, au fond.
Tes réserves sont fondées. Mais je te trouve très sévère avec un site qui propose, en amateur, des interviews de qualité avec des intervenants de haut-niveau. Ils rendent même Moix assez intéressant. Pour les articles, c'est autre chose, j'en conviens volontiers.
Oui, tu as raison. À la relecture, j'ai été trop sévère : je retire le "sans grand intérêt" (seule la rubrique "actualités" est dénuée d'intérêt). Merci de m'inciter à la modération !
Ce serait bien une première, Marat ^^.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 30 Oct 2015, 19:42
by minetvert
Marat Izmailov wrote:
minetvert wrote:
Marat Izmailov wrote:Oui, c'est l'argument fétiche de Finkielkraut dans sa croisade contre le numérique à l'école ; je n'ai pas vérifié s'il était vrai.
Very interesting mais un peu de mal à vous suivre, c'est quoi son super argument à finkiel machin?
L'argument est le suivant : les dirigeants des grandes entreprises américaines de l'internet (Google, Facebook, Amazon, Apple & Cie) privilégient pour leurs propres enfants des écoles déconnectées.
ok ! merci Marat

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 30 Oct 2015, 19:54
by Marat Izmailov
Dernières lectures :

Le Studio de l'Inutilité (Simon Leys) - Anthologie de textes de l'érudit belge Pierre Ryckmans (Leys est un pseudonyme), mort récemment. Découpés en trois grands thèmes qui résument les grands amours de Leys (la littérature, la Chine et la mer), les textes reproduits illustrent parfaitement les qualités de l'auteur : intelligence, justesse, tendresse, modestie et parfois ironie mordante. On y notamment croise Orwell, Chesterton, Michaux, Nabokov (et son fils fantaisiste), Liu Xiabo et les naufragés du Batavia. Si Leys était un fin sinologue, la partie chinoise est néamnoins (à mon sens) la plus faible. L'ensemble est délicieux (et bien écrit !). 4/5.

Le degré zéro de l'écriture suivi de Nouveaux essais critiques (Roland Barthes) - Scindé en deux, comme le titre le laisse présager, la présente édition est intéressante. Dans la première partie (Le degré...), Barthes esquisse sa théorie de la critique littéraire et linguistique ; dans la seconde (Les nouveaux essais), on la retrouve à travers des critiques précises d'auteurs et de livres à l'occasion d'articles ou de préfaces écrites postérieurement. Si la première partie est parfois ennuyeuse, "constructiviste" et jargonneuse, s'inscrivant dans des débats aujourd'hui dépassés (oubliés serait plus juste), la seconde laisse éclater toute la sensibilité et l'intelligence de Barthes. Le travail de la phrase chez Flaubert, la structure des maximes de La Rochefoucauld et la belle préface de l'édition italienne de l'Aziyadé de Loti sont à lire. Une révélation pour moi, en prime : Barthes écrivait bien, ses phrases sont extrêmement construites et réfléchies, et pour peu que l'on ferme les yeux sur le jargon, on découvre un véritable écrivain en puissance. 3/5 (surtout pour la deuxième partie, donc).

Le roi du bois (Pierre Michon) - Qu'est-ce donc ? Une nouvelle ? Un roman ? Une ode ? La description d'un triptyque en prose ? On ne serait trop dire. Plus simplement, l'histoire d'un jeune porcher dans la campagne de Mantoue dans une période que l'on devine (XVIIe) qui, au hasard d'une révélation esthétique peu banale et d'une rencontre avec un grand artiste désirera devenir ce qu'il appelle "un prince", pour finalement se retrouver "le roi du bois" 20 années plus tard. Comme toujours, chez Michon, la phrase est ciselée, précise, travaillée à l'extrême mais garde la souplesse et l'évocation de la poésie. 50 pages, me semble-t-il (cela m'a paru encore plus court en version électronique), mais d'une densité extrême et d'une beauté sans pareille. Michon serait-il le plus grand écrivain français vivant ? Plus je le lis, plus je m'en persuade. 4/5.

Histoire du bourg de Gorioukhino / Roslavev / Récits de feu Ivan Pétrovitch Bielkine / Doubrovski / La Dame de Pique (Pouchkine) - Quelques nouvelles et romans de Pouchkine. Je retiendrai plus particulièrement les Récits de... (et dans une moindre mesure Doubrovski), compilation de 5 nouvelles (ou 6, peut-être) tout à fait étonnantes. On a dit que Pouchkine a véritablement créé la littérature russe qui n'était jusque là qu'imitation des productions anglaises et des françaises. Tolstoï conseillait 50 années plus tard aux jeunes auteurs d'étudier précisément ces récits, qui restaient originaux et dont la maîtrise stylistique et narrative est exemplaire. Dans mon édition, il y a aussi quelques articles intéressants de Pouchkine sortis dans les revues littéraires d'alors, qui sont riches en renseignements quant à l'état politique et intellectuel de la Russie du début du XIXe siècle. Ce sont des classiques : pas de note (mais c'est très bien, évidemment^^).

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 12 Nov 2015, 18:35
by Marat Izmailov
Centième anniversaire de la naissance de Roland Barthes. Avis aux parisiens du forum : à cette occasion, le Collège de France organise - sous la direction d'Antoine Compagnon - un colloque demain et après-demain (entrées libres sans inscription préalable).

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 15:39
by Marat Izmailov
(Il va sans dire que la deuxième journée du colloque a été annulée suite aux événements survenus à Paris).

Dernières lectures du nazillon* :

La route des Flandres (Claude Simon) - Roman sur la débâcle de 1940, qui fut l'un des jalons les plus important du Nouveau Roman (chez les éditions de Minuit, donc) même s'il a paru quelques années avant la théorisation du genre par Robe-Grillet. Au travers de tableaux, de souvenirs, de bribes de conversation qui s'entrecroisent, l'on suit les réflexions et pérégrinations de Georges qui cherche à comprendre pourquoi son capitaine (Reixach) a donné sa vie lors des combats. Nouveau Roman oblige, c'est une oeuvre difficile d'accès : ponctuation réduite à son minimum syndical (je crois qu'il n'y a pas un seul point tout au long des 300 pages), aucune linéarité, tout est fragmenté : on a affaire à un livre impressionniste, dont les petites touches dans le détail dressent un tableau d'ensemble. Bizarrement, j'ai plutôt aimé le style ; il happe son lecteur pour ne pas le lâcher, il le plonge en apnée. Néanmoins, l'impression d'être constamment perdu peut lasser un lecteur qui n'y mettrait pas du sien. Au final, une oeuvre forte, exigeante dans son ambition stylistique, mais dont on pourrait regretter la relative faiblesse du propos. 3/5.

Le réel : traité de l'idiotie (Clément Rosset) - L'une des œuvres majeures du philosophe, qui figure dans sa trilogie sur le réel. Ici, l'idiotie n'est pas à prendre au sens commun. Pour Rosset, qui reprend l'étymologie du terme (idiotês), le réel est simple, univoque, singulier. D'où la difficulté des hommes pour le prendre, le comprendre, et le restituer au travers d'un langage insuffisant. Rosset est clair, sa prose est facile d'accès (mais nécessite un petit background philosophique), et n'hésite pas à puiser dans la littérature pour étayer son propos. La seconde partie de l'oeuvre, qui pourrait s'intituler "traité de la grandiloquence" est drôle et pertinente. 4/5.

Le malheur d'avoir de l'esprit (Alexandre Griboïedov) - La jeune littérature russe avait son La Fontaine avec Krylov, son Michelet avec Karamzine, elle trouvera son Molière avec Griboïedov. Celui-ci meurt à 35 ans dans des circonstances tragiques (décapité en Perse), et aura laissé une oeuvre à la postérité, peut-être la plus importante de tout le théâtre russe : Le malheur d'avoir de l'esprit. Le jeune Tchatski, rentrant à Moscou après 3 années à courir le monde, souhaite retrouver son amour de jeunesse ; or, il découvre une haute société russe étriquée, sèche, partagée entre vieux conservateurs à courte vue et jeunes libéraux déconnectés de la moindre réalité. Pis, son amour lui échappe, puisque la jeune Lise lui préfère un jeune intriguant sans esprit. Pièce vive et piquante, qu'on peut lire à plusieurs niveaux : historique, politique, psychologique. Tchatski y est un Alceste malgré lui convaincant. Nombre de tirades de la pièce, dit-on (c'est en tous cas ce que j'ai lu un peu partout, y compris dans l'appareil de notes de mon édition), sont devenus des proverbes courants de la langue russe. 4/5.

La dynamique du capitalisme (Fernand Braudel) - Il s'agit d'un petit livre qui reprend un cycle de trois conférences du grand historien Fernand Braudel, synthétisant ses travaux sur le processus de naissance et d'expansion du capitalisme. Deux intérêts majeurs à ses travaux : l'étude de la longue durée et un comparatisme historique entre les différentes ères de civilisation. Ces études connurent un immense succès (un peu moins que son travail sur la méditerranée, tout de même). Clair, limpide et ambitieux, même si Braudel, à la fin de sa troisième conférence, nous prévient que ses travaux seraient sans doute dépassés assez rapidement : "l'histoire est toujours à recommencer. Elle est toujours se faisant, se dépassant". Même si ses travaux avaient le défaut du système et embrassaient, dans leur folle ambition, de trop grand pans historiques, il n'est nul doute que ce brillant rejeton de Febvre et de l'école des Annales fut l'un des derniers très grands historiens français. Pas de note.

* Merci OP !

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 15:57
by Tardy-Vert42
Marat Izmailov wrote:
La dynamique du capitalisme (Fernand Braudel) - Il s'agit d'un petit livre qui reprend un cycle de trois conférences du grand historien Fernand Braudel, synthétisant ses travaux sur le processus de naissance et d'expansion du capitalisme. Deux intérêts majeurs à ses travaux : l'étude de la longue durée et un comparatisme historique entre les différentes ères de civilisation. Ces études connurent un immense succès (un peu moins que son travail sur la méditerranée, tout de même). Clair, limpide et ambitieux, même si Braudel, à la fin de sa troisième conférence, nous prévient que ses travaux seraient sans doute dépassés assez rapidement : "l'histoire est toujours à recommencer. Elle est toujours se faisant, se dépassant". Même si ses travaux avaient le défaut du système et embrassaient, dans leur folle ambition, de trop grand pans historiques, il n'est nul doute que ce brillant rejeton de Febvre et de l'école des Annales fut l'un des derniers très grands historiens français. Pas de note.
Le maitre de Jacques Heers, spécialiste du Moyen-Age dont "La Chute et mort de Constantinople" est à méditer très sérieusement.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 16:12
by Marat Izmailov
Tardy-Vert42 wrote:
Marat Izmailov wrote:
La dynamique du capitalisme (Fernand Braudel) - Il s'agit d'un petit livre qui reprend un cycle de trois conférences du grand historien Fernand Braudel, synthétisant ses travaux sur le processus de naissance et d'expansion du capitalisme. Deux intérêts majeurs à ses travaux : l'étude de la longue durée et un comparatisme historique entre les différentes ères de civilisation. Ces études connurent un immense succès (un peu moins que son travail sur la méditerranée, tout de même). Clair, limpide et ambitieux, même si Braudel, à la fin de sa troisième conférence, nous prévient que ses travaux seraient sans doute dépassés assez rapidement : "l'histoire est toujours à recommencer. Elle est toujours se faisant, se dépassant". Même si ses travaux avaient le défaut du système et embrassaient, dans leur folle ambition, de trop grand pans historiques, il n'est nul doute que ce brillant rejeton de Febvre et de l'école des Annales fut l'un des derniers très grands historiens français. Pas de note.
Le maitre de Jacques Heers, spécialiste du Moyen-Age dont "La Chute et mort de Constantinople" est à méditer très sérieusement.
Plus généralement, c'est le maître de toute une génération d'historiens (qui arrive désormais en bout de course). De Heers, j'avais lu il y a quelques années "Le Moyen Âge, une imposture" qui m'avait laissé un souvenir plus que mitigé (en dehors de la thèse, elle fort convaincante). J'avais préféré (même si les livres d'histoire ne sont pour tout dire guère ma tasse de thé) le "Pour en finir avec le Moyen Âge" de Régine Pernoud.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 16:37
by Tardy-Vert42
Concernant le Moyen-Age, j'ai bien aimé le très synthétique "les chevaliers teutoniques" d'Henry Bogdan ainsi que le très polémique "Aristote au Mont-Saint-Michel". Les racines grecques de l’Europe chrétienne " de Sylvain Gouguenheim qui tout comme Jacques Heers trouvait qu’on surestimait beaucoup trop la contribution des Arabes dans la redécouverte de la philosophie d’Aristote en Occident. (notamment Averoès) Cela a fait grande polémique il y a quelques années.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 17:00
by Marat Izmailov
Oui, j'avais suivi d'assez près la polémique à l'époque. Je ne connaissais pas le livre de Bogdan (encore un ami de la NRH, si je me souviens bien) ; merci pour le conseil. Si le goût de l'Histoire me revient, je ne manquerais pas de le lire.

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 21:16
by Le druide
Vous avez aussi le droit de lire des trucs intéressants :happy1:

:diable:

Re: (HS) La Bibliothèque Verte

Posted: 15 Nov 2015, 21:48
by Le druide
Image

Je reste grandement sur ma faim :triste1:

En cours :
Image