> Olaf
Je suis sensible à votre conception du débat. J'ai tellement débattu avec des gens qui prêchaient la tolérance comme Saint Paul prêchaient la foi et qui, dès qu'ils entrapercevaient le bout d'un nez d'une idée qui dépasse du champ des idées bien acceptées sortaient leur manuel de démonologie, que je suis content de voir que l'on peut discuter de manière courtoise, civilisée et tranquille.
Je ne sais pas si le débat fait avancer les choses. C'est un passe-temps bien agréable, certes, qui peut attirer l'attention de quelques lecteurs un peu curieux. Mais je ne crois jamais avoir vu un débat ayant fait changer d'avis l'un des participants. Je crois comme Nietzsche que ce qui est n'a pas besoin d'être démontré, et que l'argumentation est l'arme des faibles en esprit, des décadents. Faibles et décadents que nous sommes, reprenons la discussion.
La morale est absente dans la recherche scientifique
Pas totalement. La recherche scientifique est le fait d'hommes et de femmes qui ne s'extraient pas de la mélasse morale de la société dont ils sont issus ; par ailleurs les crédits plus ou moins importants accordés à la recherche scientifique sont souvent attribués en vertu de critères moraux. Les subventions aux recherches pour les énergies dites alternatives en sont un illustre exemple.
Le positivisme, dont vous faites mention, est une morale par excellence. La recherche du bien ne se fait certes plus dans les mystères tortueux de la foi, mais dans la rationnelle clarté de la raison. Le but est le même, l'esprit y est aussi grégaire : il s'agit de séparer l'humanité et ses activités en deux pôles artificiels, le bien et le mal, le bon et le mauvais. Pour Auguste Comte, l'obscurantisme est le mal. Pour Joseph de Maistre, les Lumières et la raison sont le mal. Qui disait justement, qu'il fallait philosopher
par-délà le bien et le mal ?^^
Les Lumières, les positivisme, puis en extrapôlant l'idéologie universaliste des Droits de l'Homme, ne sont que des idées chrétiennes devenues folles - telles qu'aimait à les décrire Chesterton.
aujourd'hui rien ne vient limiter le processus de recherche, qui risque donc d'engendrer les pires monstruosités
C'est un risque. Mais la vie est faite de risques. Laissez les monstruosités se créer ; et laissez les gens choisir par la suite. La science comme l'économie devraient - même si ce n'est pas possible - s'affranchir de toute réflexion morale. C'est à l'individu, confronté aux choix qui lui sont proposés, d'user de son libre-arbitre - de ce qui fait, au final, sa dignité.
Vous souhaitez régenter préventiment le bien et le mal. Vous souhaitez que la collectivité - que l'on nomme Etat ou autrement ("réflexion collective") - s'occupe en amont de ces questions pour que les individus ne se les posent pas la suite. Vous envisagez la société comme une maman aimante qui doit éduquer ses petits. C'est bien ce que je soulignais plus haut, et c'est bien ce qui fait notre différence.