Pour moi, tout simplement, la gauche a transféré ses préoccupations prioritaires du social au sociétal. Et dans gauche, j'inclus l'extrême-gauche d'aujourd'hui (FdG, NPA...). Elle met énormément l'accent sur l'antiracisme, le féminisme, la libéralisation des mœurs, la défense des minorités (LGBT, etc) et des sans papiers, le multiculturalisme, l'antifascisme... Bref effectivement je pense que ces sujets touchent principalement des classes plus aisées que le prolétariat. Concernant ce dernier, je pense que non seulement il se sent "abandonné" car les luttes qui le concernent en priorité (chômage, inégalités, défense de classe, anti-libéralisme) ont été mises au second plan ou atténuées par un certain laxisme de compromission face aux dérives du néo-capitalisme. Mais en plus, je pense que les classes populaires ne se retrouvent pas forcément dans ces valeurs sociétales de la nouvelle gauche (j'avais lu une étude montrant que ces classes sont assez patriotes et moralement plutôt conservatrices, ce que je constate dans la vie au demeurant). Ca ne leur parle plus.merlin wrote:Pour remplacer cet électorat populaire perdu, la gauche s'est effectivement recentrée (au sens politique du terme) car elle vise (outre ses traditionnels soutiens fidèles: fonctionnaires, milieux culturels, etc) les catégories plus aisées, libérales au niveau sociétal mais beaucoup moins aventureuses au niveau économique et social.
En outre, elle cible également les minorités:
- religieuses (le vote musulman lui est acquis très largement).
- ethniques: les enfants d'immigrés d'Afrique lui sont très largement acquis, quand ils votent...et elle va probablement sous peu remettre sur le tapis le droit de vote des étrangers (quand le peuple vote mal, on le remplace...).
- sexuelles: toutes les réformes sociétales réalisées ou envisagées sont là pour les satisfaire.
Bref, sur bien des points, la gauche s'est reniée et il ne faut donc pas s'étonner que les catégories populaires votent de plus en plus FN (même si ce n'est pas, encore, la majorité, n'est ce pas ulysse?).
Dans ma fac, ceux qui font partie des mouvements d'extrême-gauche ou antifas sont d'ailleurs souvent des enfants de famille aisées ou de classe moyenne. Ce sont eux qui font des textes à l'écriture féminisée ("cher-e-s étudiant-e-s" ! ça c'est subversif tiens) parlant principalement de lutte contre les fachos, de racisme, de sexisme, de droit à l'avortement, de transsexuels... Les mouvements de gauche radicale et anarchistes sont tous englués dans cette obsession sociétale aujourd'hui.
Il n'y a plus aucune analyse profonde et subtile du fonctionnement du néo-capitalisme mondialisé, et de ses armes. Le libéralisme libertaire, le capitalisme de séduction (idéologie du désir... cf Clouscard), l'individualisation des masses par la perte des repères et des structures (qui sert la société de consommation), le mondialisme... Enfin je ne vais développer, mais je regrette juste l'abaissement de la conscience sociale et politique de toute une gauche qui se complait dans un conformisme à glacer le sang. Un Proudhon doit se retourner dans sa tombe.